La naissance miraculeuse de son Excellence ‘Isâ (as) selon les Evangiles, le Coran et les hadiths (2)
La grossesse de Maryam (as) au regard des hadiths
On rapporte de l’Imâm al-Bâqer (as) : « Jabra’îl saisit le collet de Maryam (as) et y souffle d’un souffle par lequel l’enfant qui se trouve dans son sein atteint sa pleine maturité en l’espace d’une heure, maturité qui dans la matrice des autres femmes nécessite neuf mois de temps. Oui, en l’espace d’une heure, cette femme se trouve enceinte, et sa grossesse est si visible que lorsque sa tante maternelle la regarde, elle ne la reconnaît pas. Maryam (as) a honte vis-à-vis d’elle (1) et vis-à-vis de Zakariyyâ (2) (as), aussi elle se met en route et part. » Certains exégètes estiment que sa grossesse dure neuf heures. C’est ce que l’on rapporte notamment de l’Imâm al-Sâdeq (as). Dans le Majma‛ al-Bayân, sous le verset : « Les douleurs la surprirent auprès du tronc du palmier. Elle dit : ‘Malheur à moi ! Que ne suis-je déjà morte, totalement oubliée !’ » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 23), on rapporte ces explications de l’Imâm al-Sâdeq (as) : « La raison pour laquelle Maryam (as) souhaite la mort est que parmi son peuple, il ne se trouve pas même un individu suffisamment brave et perspicace pour la disculper. » Dans le même ouvrage, sous le verset : « L’enfant qui se trouvait à ses pieds l’appela : ‘Ne t’attriste pas ! Ton Seigneur a fait jaillir un ruisseau à tes pieds.’ » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 24), on trouve cette explication : « Jabra’îl frappe le sol de son pied, ce qui fait jaillir une eau savoureuse. » D’autres exégètes nous l’expliquent autrement : « Au contraire, lorsque ‘Isâ (3) (as) frappe le sol de son pied, une eau sort et se met à couler. » C’est d’ailleurs ce que l’on rapporte de l’Imâm Abî Ja‛far (4) (as). Dans un autre hadith, également cité dans le même livre, Ibn ‘Umar rapporte de son Excellence qu’il s’agit d’un ruisseau que Dieu fait sortir de terre pour Maryam (as) pour qu’elle puisse se désaltérer. Le Khisâl qui compte quatre cents paragraphes rapporte que ‘Alî (as) déclare : « La femme enceinte ne peut rien manger de meilleur que la datte fraîche, et c’est pourquoi Dieu a dit à Maryam (as) : ‘Secoue vers toi le tronc du palmier ; il fera tomber sur toi des dattes fraîches et mûres. Mange, bois et cesse de pleurer. Lorsque tu verras quelque mortel, dis : J’ai voué un jeûne au Miséricordieux ; je ne parlerai à personne aujourd’hui. ’ » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 25 et 26). Le même contenu se retrouve tant dans les hadiths sunnites rapportés de l’Envoyé de Dieu (s) que dans des hadiths shiites rapportés de l’Imâm al-Bâqer (as). Dans le Kâfî, Kulaynî rapporte lui-même de Jarrâh al-Madâ’inî, qui le rapporte de l’Imâm al-Sâdeq (as) : « Le jeûne ne consiste pas seulement à s’abstenir de manger et de boire. » Là, il récite : « ‘Lorsque tu verras quelque mortel, dis : J’ai voué un jeûne au Miséricordieux ; je ne parlerai à personne aujourd’hui.’ (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 26). Ici il est question du jeûne du silence. » Dans un autre hadith, il précise : « Ici il est question du jeûne du silence. Alors vous aussi, lorsque vous jeûnez, surveillez votre langue, fermez vos yeux, ne vous querellez pas, ne vous jalousez pas les uns les autres… » Dans le livre de Sa‛d al-Sa‛ûd ibn Tâwûs, il est rapporté du livre de ‘Abd al-Rahmân ibn Mohammad Azadî : « Samâk ibn Harb m’a rapporté de Mughayra ibn Shu‛ba : ‘L’Envoyé de Dieu (s) m’a envoyé à Najrân afin de les appeler [à l’islam]. Ils m’ont opposé une objection à laquelle je me suis trouvé incapable de répondre. Ils m’ont dit : Votre Coran dit que Maryam (as) est la sœur de Harûn (5) (as), on y lit : Ô sœur de Hârûn, or un trop grand nombre d’années les sépare. Je me suis alors rendu auprès de l’Envoyé de Dieu (s) et lui ai exposé mon problème. Il m’a dit : Pourquoi ne leur as-tu pas répondu que chez eux, il est courant de donner aux gens les noms des prophètes (as) et des pieux parmi leurs ancêtres ? ’ » Dans le Tafsîr al-Durr al-Manthûr, ce hadith est rapporté de manière détaillée, tandis qu’il apparaît de façon résumé dans le Majma‛ al-Bayân. Cela dit, les deux ouvrages rapportent ces propos de Mughayra ibn Shu‛ba, qui les rapporte de l’Envoyé de Dieu (s). Pour résumer, les propos relatés précisent que dans la phrase « Ô sœur de Hârûn », Hârûn est le nom d’un homme qui porte le même nom qu’Hârûn (as) le prophète et frère de Mûsâ (6) (as). Précisons qu’en outre, rien ne prouve que l’homme dont le nom est cité ici compte parmi les pieux, comme certains ont pu le penser. Le Kâfî et le Ma‛ânî al-Akhbâr rapportent de l’Imâm al-Sâdeq (as) à propos du mot mubârakan / مبارك, qui apparaît dans le verset 31 de la sourate Maryam (Marie) : « Il m’a béni, où que je sois », qu’il s’agit d’utilité [ce qui donne : « Il m’a rendu utile, où que je sois. »]. Ce hadith, dans le Durr al-Manthûr, est rapporté par les auteurs des recueils de hadiths rapportés du Prophète (s) par Abû Hurayra de la manière suivante : afin d’expliquer le sens des paroles de ‘Isâ (as) lorsqu’il dit : « Il m’a béni, où que je sois », l’Envoyé de Dieu (s) a dit que cela avait pour sens : « Quel que soit la direction vers laquelle je me tourne, que je sois utile aux gens. » C’est dans le Durr al-Manthûr qu’Ibn ‘Adî et Ibn ‘Asâkar rapportent d’Ibn Mas‛ûd que l’Envoyé de Dieu (s) a dit afin d’expliquer cette même phrase : « C'est-à-dire : ‘Il a fait de moi un précepteur.’ » Dans le Kâfî, Kulaynî rapporte lui-même d’Al-Kanâsî : « J’ai demandé à Abû Ja‛far (7) (as) : ‘Lorsque ‘Isâ ibn Maryam (as) s’adressait aux gens depuis son berceau, était-il l’Argument de Dieu (8) pour les gens de son époque ?’ Il m’a répondu : ‘Il était alors prophète et Argument de Dieu, mais il n’était pas encore envoyé (mursal / مرسل). N’as-tu pas entendu lorsqu’il dit : « Je suis, en vérité, le serviteur de Dieu. Il m’a donné le Livre ; Il a fait de moi un Prophète ; Il m’a béni où que je sois. Il m’a recommandé la prière et l’aumône – tant que je vivrai –. » ?’ (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 30 et 31). Je lui ai alors demandé : ‘Par conséquent, à ce stade de l’enfance, à ce moment déjà, il était l’Argument de Dieu pour Zakariyyâ (as) ?’ Il m’a répondu : ‘A ce moment, ‘Isâ (as) était le signe de Dieu (9) et une miséricorde de Sa part envoyé à Maryam (as). Lorsqu’il prit la parole et défendit Maryam (as), il était pour chacun de ceux qui entendaient ses paroles, un prophète et l’Argument de Dieu. Bien entendu, tant qu’il s’exprimait, il était l’Argument de Dieu, et lorsqu’il se tût, durant les deux années où il ne dit rien, c’était Zakariyyâ (as) qui était l’Argument de Dieu pour Maryam (as). Après la mort de Zakariyyâ (as), c’est son fils Yahyâ (10) (as) qui hérite de lui du Livre et de la Sagesse, alors qu’il n’est lui-même également qu’un petit enfant. N’as-tu pas entendu les paroles de Dieu : « ‘Ô Jean ! Tiens le Livre avec force !’ Nous lui avons donné la Sagesse alors qu’il n’était qu’un petit enfant. » ? (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 12) Lorsque ‘Isâ (as) a atteint l’âge de sept ans, il fut appelé à la prophétie, car c’est à ce moment-là que Dieu a fait descendre sur lui la révélation. Par conséquent, ‘Isâ (as) est l’incarnation même de l’Argument de Dieu pour Yahyâ (as) pour tout le monde. En vérité, Ô père de Khâled, depuis le commencement, lorsque Dieu a créé Âdam (as) et l’a placé sur la terre, jamais la terre ne s’est trouvée vide de l’Argument de Dieu, ne serait-ce qu’un seul jour.’ »
Maryam (as) revient vers son peuple accompagnée de l’enfant
Lorsque Maryam (as) entend le message des anges lui annonçant que son enfant peut parler depuis son berceau, elle se tranquillise et c’est pourquoi après sa naissance elle revient vers son peuple en sa compagnie. « Elle se rendit auprès des siens en portant l’enfant. » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 27). Lorsque les gens de son peuple voient le nouveau-né dans ses bras, ils manifestent leur étonnement. Alors qu’ils connaissaient la vertu de Maryam (as) et avaient entendu louer sa piété et les miracles qu’elle avait suscité, les voici fortement inquiets, à tel point que certains en viennent à douter, et que d’autres plus encore se mettent à la juger avec empressement jusqu’à l’invectiver et à la blâmer, s’écriant : « Quel dommage pour ces glorieux antécédents, perdus par cette pollution ! Il est cent fois dommage que cette famille pure soit ainsi discréditée ! » « Ils dirent : ‘Ô Marie ! Tu as fait quelque chose de monstrueux ! » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 27).
Certains s’exclament : « Ceci est étrange ! » D’autres s’interrogent : « Quel est cet acte abominable ? » Ils l’interpellent : « Ô sœur d’Aaron ! Ton père n’était pas un homme mauvais et ta mère n’était pas une prostituée (alors pourquoi as-tu abandonné leur voie et emprunté une voie inconvenante ? Chacun sachant bien que Maryam (as) ne s’était pas mariée…). » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 28). Le fait qu’ils l’appellent : « Ô sœur d’Aaron ! » suscite différentes interprétations parmi les exégètes, or ce qui semble le plus juste est que Hârûn soit un homme pur et vertueux, ce que corrobore une expression proverbiale qui a cours parmi les Banî Isrâ’îl (11) et qui dit à propos de celui ou celle qui l’on veut faire connaître en tant que pur(e) : « Il est le frère / elle est la sœur de Hârûn. » Dans le Majma‛ al-Bayân, feu Tabarsî rapporte cette même explication dans un court hadith attribué au prophète (s). Dans un autre hadith présent dans le livre Sa‛d al-Sa‛ûd, nous lisons : « Le Prophète (s) a envoyé Mughayra à Najrân (afin d’inviter les chrétiens à l’islam). Un groupe de chrétiens dirent afin (d’ergoter à propos du Coran) : ‘N’est-il pas écrit dans votre livre : Ô sœur d’Aaron ! alors que nous savons que s’il s’agit-là du frère de Mûsâ (as), il se trouve une trop grande période de temps qui sépare Maryam (as) de Hârûn (as) ?’ Comme Mughayra ne parvient pas à répondre, il expose le problème au Prophète (s), qui lui dit : ‘Pourquoi ne leur as-tu pas répondu qu’il est habituel parmi les Banî Isrâ’îl d’identifier les gens bienfaisants au prophètes (as) et aux vertueux ?’ » Face à ces objections, Maryam (as), recevant un ordre occulte, désigne le nouveau-né. Ce qui veut dire en somme : « La réponse à vos questions est à la charge de cet enfant. » La voyant désigner l’enfant, ils s’enfoncent davantage dans la stupéfaction et s’insurgent : « Comment parlerions-nous à un petit enfant au berceau ? » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 29). Afin d’écarter l’accusation portée contre elle pour avoir mis au monde un enfant sans père, Maryam (as), sur l’ordre de Dieu, désigne le berceau de son nouveau-né, ‘Isâ (as). Là, l’enfant se met à parler et expose dans un langage éloquent et clair sa propre servitude à l’égard de Dieu. Il révèle également sa qualité de prophète, et le fait qu’il n’est pas possible qu’un prophète doué d’une telle majesté soit issu d’un sein pollué. Il établit ainsi par la même occasion, miraculeusement, la chasteté de sa mère.
Le discours fait par le Masîh (as) depuis son berceau
La biographie de Maryam (as) et de son fils (as) est constellée de miracles. Afin d’être soulagée face à l’opposition et aux reproches que lui adressent les gens, Maryam (as), sur l’ordre de Dieu, se tait. La seule chose qu’elle fait est de désigner son nouveau-né, ‘Isâ (as), ce qui ne fait que susciter davantage la perplexité des témoins de la scène. Il se peut que certains, avec le sentiment d’être raillés, aient dit de colère: « Maryam (as), par cet acte que tu as accompli, tu fais de ton peuple la risée de tous. » Quoi qu’il en soit, ils lui demandent : « Comment parlerions-nous à un petit enfant au berceau ? » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 29). Là, son Excellence le Masîh (as) prononce plusieurs phrases, ce qui dissipe les calomniateurs et ferme la voie à l’excès et à la frénésie. Car il s’agit bien là d’ignorants, d’excessifs et de calomniateurs. A cause de leur ignorance, une partie des Banî Isrâ’îl se livre à l’excès, accusant Maryam la Vierge (as) d’impureté, tandis que l’autre partie, toujours sous l’effet de l’ignorance, commet l’excès de considérer ‘Isâ (as) comme le fils de Dieu. Cependant, ‘Isâ (as), depuis son berceau, s’interpose et contient la calomnie par un discours si lumineux qu’il met un terme aux conséquences de cette ignorance. L’explication est que le fait qu’il s’exprime depuis son berceau constitue un miracle, or jamais personne impure n’a occasionné un miracle ou rendu manifeste un signe de Dieu. De ce fait, son Excellence ‘Isâ (as), lorsqu’il se met à parler, établit pour tous : « Je suis pur et je suis venu au monde de ma mère pure. » Son discours ferme la porte aux débinages des calomniateurs, à toute éventualité qu’une personne prétende : « ‘Isâ (as) est le fils de Dieu. » Sur l’ordre de Dieu, cet enfant fait alors un discours et se présente lui-même par ces qualités :
1 – Je suis le serviteur de Dieu. 2 – Le Livre m’a été donné. 3 – J’ai été placé parmi les prophètes (as). 4 – Mon être, où qu’il se trouve, constitue une source de bénédiction. 5 – On m’a recommandé d’offrir la prière et l’aumône tant que je serai en vie. 6 – Je suis bon envers ma mère et jamais je ne suis hautain ni cruel. 7 – Le jour de ma naissance, comme le jour de ma mort, et comme le jour où je serai ressuscité, je suis inscrit dans la miséricorde divine, comme on peut le lire ici : « Je suis, en vérité, le serviteur de Dieu. Il m’a donné le Livre ; Il a fait de moi un Prophète ; Il m’a béni où que je sois. Il m’a recommandé la prière et l’aumône – tant que je vivrai –et la bonté envers ma mère. Il ne m’a fait ni violent, ni malheureux. Que la Paix soit sur moi, le jour où je naquis ; le jour où je mourrai ; le jour où je serai ressuscité. » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 30 à 33). Il apparaît donc dans les versets de la sourate Maryam que ‘Isâ (as) parle dès les premiers jours de sa vie, ce qui est normalement impossible pour un nouveau-né et constitue en soi un grand miracle. Cependant, le fait de parler à l’âge adulte et à l’heure de la vieillesse est une chose tout à fait normale, or, s’il est question dans le verset de ces deux âges, il se peut que ce soit pour expliquer que s’il s’exprime déjà de cette façon dans son berceau, lorsqu’il sera adulte et aura atteint l’apogée de sa vie, il produira un discours mesuré, lumineux et expérimenté, et non une parole enfantine. Il se peut également que cette formulation désigne la réalité que le Masîh (as), de sa prime jeunesse à l’heure de sa vieillesse, exprime constamment une parole de vérité et qu’il se maintient sur la voie de la guidance des créatures. En sus, cette formulation au sujet de ‘Isâ (as) semble caractériser une prédiction et désigner son avenir, car nous savons, conformément à l’histoire, que son Excellence le Masîh (as) n’atteindra pas un âge avancé dans ce monde : il sera enlevé à l’humanité à l’âge de trente-trois ans, lorsque Dieu l’emportera au ciel. Selon de nombreux hadiths, il reviendra (12) parmi les gens au moment de l’apparition de son Excellence le Mahdî ('aj) (13) , et il s’adressera à eux comme il l’a fait au tout début de sa vie.
L’expression mina-s-salehîn / من الصالحين / au nombre des justes, que l’on trouve dans ce verset : « Dès le berceau il parlera aux hommes comme un vieillard ; il sera au nombre des justes. » (sourate Âl-i ‘Imrân (La famille de 'Imrân) ; 3 : 46), nous indique que d’être juste représente le plus grand des honneurs que puisse recevoir l’être humain, un honneur si grand qu’il semble bien que l’ensemble des valeurs humaines s’y côtoient. Son Excellence (as) n’est absolument pas troublée par la question relative à sa naissance, même si c’est de là que proviennent toutes les difficultés soulevées par les gens, pour le simple fait qu’un enfant qui vient de naître prenne la parole constitue un miracle qui, quoi que l’on puisse dire, ne laisse subsister aucun doute et impose son caractère véridique. En particulier si l’on considère qu’à la fin de son discours, il appelle le salâm (14) sur lui-même, attestant en cela de sa pureté et de son exemption à l’égard de toute souillure, de tout vice, nous informant sur la pureté de sa constitution. ‘Isâ (as) commence son discours en disant : « Je suis, en vérité, le serviteur de Dieu. » Il avoue son état de servitude à l’égard de Dieu, il barre la route aux exagérateurs et aux excessifs et leur adresse un ultime avertissement, comme on peut le voir à la fin de sa prise de parole : « Dieu est, en vérité, mon Seigneur et votre Seigneur. Adorez-Le ! Voilà la voie droite ! » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 36). Il informe les gens que le Livre lui a été donné - qui apparemment fait référence à l’Evangile (15) -, puis il fait l’annonce de sa qualité de prophète. Cette phrase fait apparaître qu’à ce moment-là, ‘Isâ (as) n’est que nabî (16) / نبي. Ce n’est que plus tard que Dieu le sélectionnera en tant que « porteur de messages ». Pourtant, ses paroles nous font comprendre qu’à ce moment précis, le Livre et la qualité de prophète lui ont été donnés. Rien ne nous prête à croire que ces mots concernent l’avenir. « Il m’a béni où que je sois. Il m’a recommandé la prière et l’aumône – tant que je vivrai - » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 31). Le fait qu’il soit béni où qu’il se trouve, signifie qu’il est lui-même le lieu de la bénédiction, la bénédiction au sens où il fait croître le bien. Ce qui veut dire qu’il revêt un grand intérêt pour les gens, car plus tard il leur enseignera le savoir à leur profit, il les invitera à la bonne action, il les instruira à une civilité plus nette, il guérira la cécité, la lèpre, il amendera les puissants, il fortifiera les faibles et leur viendra en aide. Dans la phrase suivante, il indique que dans la loi qui est la sienne, la prière et l’aumône sont prescrites. La prière consiste à ce que l’attention du serviteur soit exclusivement tournée vers Dieu le Glorifié, et l’aumône consiste à donner de ses biens. Ces deux décrets apparaissent plus de vingt fois dans le Coran de manière symétrique, par conséquent, il n’y a pas lieu de nous attarder sur ce que certains prétendent, à savoir que l’aumône désigne la purification de l’âme et ne concerne pas obligatoirement les biens matériels.
A la suite de son discours, ‘Isâ (as) dit qu’il a été rendu bienfaisant envers les gens, ce qui se manifeste dans la bonté qu’il a à l’égard de sa mère. Il dit aussi qu’il n’est ni oppressif ni cruel envers les autres. On dit de quelqu’un qu’il est jabbâr / جبار lorsqu’il impose sa tyrannie aux autres tandis qu’il ne subit pas lui-même la tyrannie des gens. Ibn ‘Atâ’ rapporte que le jabbâr / جبار est celui qui ne veut pas le bien. On dit de quelqu’un qu’il est shaqî / شقي lorsqu’il n’agréé par la bienfaisance venant des autres. Ce qui est étonnant ici est qu’au cours de la description qu’il fait de lui-même, ‘Isâ (as) mentionne sa bonté envers sa mère, alors que c’est exactement le contraire de ce que l’on peut déduire des Evangiles canoniques.
Au cours de son existence, son Excellence ‘Isâ (as) mentionne les trois jours particuliers qui comportent une importance prépondérante pour les êtres humains. Car chacun de ces trois jours se situe à l’aube d’une nouvelle vie : le jour de la naissance, le jour du trépas et le jour de la résurrection.
Le huitième Imâm (17) (as) dit : « En trois occasions l’être humain est amené à ressentir plus de frayeur qu’en d’autres circonstances : 1 – Le jour où il vient au monde. 2 – Le jour où il trépasse et aborde l’autre monde ainsi que ceux qui l’habitent. 3 – Le jour où il est ressuscité et voit les décrets et les jugements qu’il ne voyait pas dans ce monde. Dieu répand Ses salutations sur Yahyâ (as) en ces trois circonstances, comme Il les répand sur le Masîh (as) en ces trois circonstances. Après avoir exposé cette biographie, le Coran rappelle que la biographie du Masîh (as) est ainsi faite, que la parole de vérité à propos de sa naissance est ainsi que nous l’avons entendue : « Celui-ci est Jésus, fils de Marie. Parole de Vérité dont ils doutent encore. » (sourate Maryam (Marie) ; 19 : 34).
Notes:________________________________________
1- Il s’agit d’Elisabeth / Elisabat (as). (Texte traduit du persan. Les notes sont du traducteur et les traductions des passages du Coran de Denise Masson).
2- Zacharie (as).
3- Jésus (as).
4- L’Imâm Mûsâ al-Kâzem (as).
5- Aaron (as).
6- Moïse (as).
7- L’Imâm Mûsâ al-Kâzem (as).
8- L’Argument de Dieu, ici, correspond à la notion de Lieutenant de Dieu sur la terre et d’Imâm de son époque (là où les soufis parleraient de pôle / qutb / قطب, même si la notion est différente). Aussi, il ne peut y en avoir qu’un seul, contrairement aux prophètes qui peuvent se côtoyer par dizaines au cours d’une même époque, c’est pourquoi Al-Kanâsî s’étonne qu’un enfant au berceau puisse tenir ce rôle face à des prophètes âgés et expérimentés…
9- Littéralement : l’Ayatollâh, dans le sens où un seul suffit parmi les êtres humains pour assumer l’axe vertical, et dans le sens où l’absence d’un tel être signifie la fin de l’espèce humaine, avec toutes les conséquences que cela pourrait engendrer, l’être humain étant le seul à être assez violent et assez ignorant – selon les mots même du Coran – pour assumer le dépôt divin… Ceci nous permet de comprendre au passage le caractère insensé de la multiplication des « ayatollâh », que l’on produit à la chaîne, et dont le nombre fait perdre tout son sens à cette notion… Par ailleurs, il est évident que la notion de Signe de Dieu comporte des niveaux différents, ainsi, on emploie le même terme de Signe de Dieu pour qualifier un verset du Coran, ou même un moustique, car chaque créature constitue en soi un témoignage de son créateur…
10- Jean le baptiste (as).
11- Les fils d’Israël (as).
12- Il sera « re-suscité » : suscité de nouveau.
13- Pour ‘ajal Allâhû ta‛âlâ faraja (Que Dieu hâte sa (noble) délivrance).
14- La notion de salâm est très proche de celle de salut, car dans les deux cas il est question de sauvegarde, de félicité, de santé, d’un état exempt du péché, aussi, au passage, pour les musulmans qui vivent sur une terre hostile aux signes extérieurs islamiques, il est donc certainement possible d’utiliser l’expression « salut ! » pour rester discret sans pour autant abandonner le salâm…
15- Dans le Coran et dans les écrits musulmans, l’Evangile est toujours au singulier. Ce terme désigne en réalité ce que l’on pourrait appeler la Sunna de ‘Isâ (as) qui se compose du récit de sa vie, de ses actes et de ses dires. L’Eglise catholique et romaine parle quant à elle des Evangiles au nombre de quatre. Il s’agit des Evangiles canoniques, soit quatre textes sélectionnés parmi des dizaines de textes évangéliques, les autres, dits apocryphes, étant définitivement exclus et disqualifiés. Aussi, la notion d’Evangile, dans une perspective plus large, peut englober l’ensemble de ces textes et chercher à les unifier. Ce qui ne gêne pas les musulmans au demeurant, ayant le Coran pour servir de critère, selon cette règle simple qui dit que l’ « on garde ce qui s’accorde au Coran et que l’on rejette ce qui le contredit ». C’est cette même règle qui s’applique pour les hadiths. Les dizaines d’évangiles apocryphes forment en réalité le corpus des hadiths christiques…
16- Dans la langue du Coran, deux mots distincts correspondent à deux degrés de la prophétie, or ils sont tous les deux traduits par « prophète » en français, ce qui annule leur distinction dans cette langue: il s’agit du mot nabî / نيس et du mot mursal, ou rasûl / مرسل يا رسول. Le nabî entend la voix de l’Ange de la Révélation et reçoit des instructions qui le concernent, mais n’a pas de message à transmettre et ne reçoit pas de Livre, c’est alors son exemple qui sert la prophétie. Le mursal, ou rasûl, est envoyé aux hommes, il est missionné et reçoit généralement pour cela un Livre. Aussi, tous les mursal sont des nabî, mais peu de nabî sont des mursal… En français, pour éviter les confusions, il est possible de parler de « prophète » et de « prophète envoyé » pour les distinguer…
17- L’Imâm al-Rezâ (as), enseveli à Mashhad dans le Khorâsân, au nord-est de l’Iran. Il suscite l’un des plus importants pèlerinages fixes du monde, soit entre quinze et trente millions de pèlerins par an (selon que l’on se réfère au CNRS ou aux autorités locales, rapport équivalent à celui qui prévaut généralement entre les chiffres donnés par la police et ceux donnés par les manifestants…), ce qui représente au bas mot le double de la fréquentation du Hajj, à Makka / La Mecque !
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