La théosophie dans les propos du Prince des martyrs, l’Imam Hussein (Paix sur lui)
Là où s’arrête la philosophie, commence la théosophie ou "‘Irfân", et là où l’intelligence usuelle arrive à ses fins, commence tout juste l’intelligence transcendante, l’intelligence suprême.
L’Imam Hussein (Paix sur lui) dit dans l’invocation connue sous le nom de "Du’a ul ‘Arafat" :
“كَيْفَ يُسْتَدَلُّ عَلَيْكَ بِما هُوَ فی وُجُودِه مُفْتَقِرٌ اِلَيْكَ”
« Comment peut-on chercher à te connaitre à travers ce dont l’existence même a besoin de toi ? »
La méthode de la théologie systématique et de la philosophie se base sur le principe de la causalité, lequel consiste à partir de l’effet pour découvrir la cause, soit l’induction. Dans ces deux sciences rationnelles, l’on prouve l’existence de l’Etre nécessaire par l’existence d’un être contingent à travers divers raisonnements, dont la plupart se fonde sur le fait que l’existence d’un être contingent implique absolument l’existence un être nécessaire, en vertu de l’absurdité du cercle vicieux. C’est comme si l’on prouvait par exemple l’existence de l’océan par l’existence des vagues en déclarant que puisqu’il y a les vagues, donc l’océan existe absolument, voire que parce qu’il y a des bulles, alors la mer existe fatalement ; ou encore prouver l’existence de l’essence à travers celle de l’accident en disant que puisqu’il y a la blancheur, alors la feuille de papier existe.
Bref, l’on démontre l’existence d’un être indépendant et existant par soi-même à partir de celle des êtres indigents qui sont en soi nécessiteux.
Dans la déclaration du Prince des martyrs (Paix sur lui), cette méthode est en fait remise en question. En effet, comment peut-on prouver l’existence du Très-Haut à travers une créature dont toute l’identité n’est que dénuement et besoin ?
Si la méthode susmentionnée est celle de la philosophie et de la théologie systématique, comment doit-on appeler celle de l’Imam Hussein, laquelle consiste à voir d’abord l’océan et ensuite les vagues, à observer avant tout la mer et ensuite les bulles ; autrement dit de considérer en premier lieu l’existence de l’être indépendant existant par soi-même, avant de se tourner vers ses manifestations ?
On peut affirmer que là où s’arrête la philosophie, commence à peine la théosophie, et là où l’intelligence ne trouve plus des solutions, le cœur prend les rênes. Et pour être plus précis, là où l’intelligence usuelle atteint ses limites, commence l’intelligence transcendante. Le fait de voir tout d’abord l’océan et ensuite les vagues, lesquelles doivent être considérées comme les manifestations de cet océan constitue la méthode de l’intelligence transcendante ou suprême, et non pas celle de l’intelligence ordinaire. Il s’agit en fait de la méthode de la théosophie ou ‘Irfân, et non pas celle de la philosophie ordinaire.
En effet, en philosophie, la causalité use de deux types de raisonnements, à savoir le raisonnement inductif, dans lequel l’on va de l’effet vers la cause, et le raisonnement déductif dans lequel l’on évolue plutôt de la cause vers l’effet. Etant donné que Dieu le Très Haut est la Cause absolue, lequel n’est l’effet d’aucune cause, les grands philosophes islamiques ont stipulé que pour démontrer l’existence de Dieu on ne peut nullement procéder par déduction. Par conséquent, tous les raisonnements usités pour prouver l’existence de Dieu sont en réalité des raisonnements inductifs. Et le raisonnement inductif, comme nous l’avons vu, consiste à prouver l’existence l’Être Sublime et opulent à partir d’un être besogneux. Il s’agit d’une méthode philosophique. Quant au principe qui consiste à considérer en premier lieu l’existence de l’Être opulent, indépendant et existant par soi-même et ensuite celle de la créature dépendante et nécessiteuse est un concept de l’au-delà de la philosophie que l’on doit appeler l’intelligence suprême, autrement dit la théosophie ou ‘Irfân.
De quelle dépendance, de quel besoin est-il question dans la déclaration de l’Imam Hussein (Paix sur lui) ?
La dépendance des êtres entre eux n’est pas toujours le même ni constant, mais varie plutôt en intensité et en degré, autrement, il est discutable. En guise d’exemple, le besoin d’un architecte pour un édifice est discontinu et éphémère. C’est-à-dire que, pendant toute la durée de la construction de l’édifice, l’existence de l’architecte est indispensable. Mais après sa finition, à supposer que l’architecte vienne à disparaitre, l’édifice demeurera toujours et n’en souffrira aucunement. Néanmoins, le besoin de l’édifice, du point de vue physique, des matériaux est un besoin permanent et continu. En d’autres termes : "Pas de matériaux, pas d’édifie !".
Dans tous les cas, la réflexion sur les différentes sortes de besoins des créatures entre elles est une réflexion opportune et profonde qui fait découvrir des points subtils et très délicats.
En philosophie, dans le chapitre portant sur le besoin qu’ont les créatures du véritable créateur, et les êtres contingents de l’Etre nécessaire, divers sujets ont été abordés. On peut se permettre de dire que l’avis des partisans de l’école de Molla Sadra selon lequel il existe entre la Cause absolue, soit le Créateur suprême, et ses effets "Une relation cohérente" est la meilleure interprétation. Pour illustrer cette cohérence, on peut considérer la relation existant entre la vague et la mer. En réalité les vagues de la mer ne sont autres que la mer elle-même dans un mouvement ondulatoire. C’est aussi le cas de la relation entre les accidents et leur essence, à l’instar de la relation entre la forme rectangulaire et le papier voire la blancheur et ce même papier, lesquelles constituent des relations cohérentes.
De ce fait, si le besoin des créatures vis-à-vis de leur créateur est semblable à celui d’un édifice vis-à-vis de l’architecte, la phrase à la forme interrogative du Prince des martyrs (Paix sur lui) n’aura aucun sens ; car, il est bien évident que l’existence de l’édifice est une preuve de l’existence de l’architecteur.
Cependant, cette phrase aura un sens lorsque le besoin qu’ont les créatures du créateur est semblable à celui des vagues vis-à-vis de la mer, c'est-à-dire cette relation cohérente et l’indigence existentielle auxquels fait allusion l’école de Sadra dans ses discours.
A ce niveau, nous réalisons que la philosophie de Sadra c’est en fait au-delà de la philosophie ordinaire et qu’elle a été avec raison appelée "Philosophie suprême". En d’autres termes, cette philosophie transcendait la philosophie usuelle et en vogue à son époque et constitue une forme de théosophie théorique.
Source : FARS NEWS AGENCY
Ajouter un commentaire