La culture religieuse et son rôle dans les progrès scientifiques et culturels des premiers siècles de la civilisation islamique

L’histoire de l’irréligiosité, et de l’animosité contre les religions – et des différentes ruses et astuces employées – est peut-être aussi ancienne que l’histoire de l’humanité elle-même.
De nos jours, cette tendance répugnante existe encore, et ses partisans reprennent les mêmes rumeurs non fondées, obsolètes et périmées d’antan, en essayant de les présenter sous une nouvelle forme afin de les suggérer aux nouvelles générations, mais cette fois-ci par des méthodes modernes. Parmi les rumeurs non fondées que les partisans de l’irréligiosité veulent propager, il y en a une qui vise à suggérer que la culture religieuse n’a eu aucun effet positif sur les développements et les progrès scientifiques et culturels du monde de l’Islam, pendant les premiers siècles de la civilisation musulmane. En réalité, il leur est totalement impossible de nier ou de contester l’existence desdits progrès, mais ils focalisent leurs efforts sur le reniement du rôle de la religion, et ce afin de détourner l’attention de l’opinion publique de l’importance primordiale de la religiosité. Ces détracteurs reformulent leurs accusations anciennes et répétitives en disant : « Du IIe au VIe siècles de l’hégire, le monde de l’Islam est un foyer culturel en plein essor et épanouissant. Or, les islamologues du siècle dernier ont inventé le surnom de ‘culture islamique’ pour désigner cette période historique, tandis que cet épanouissement culturel et scientifique n’a eu rien à voir avec la religion. » Dans le présent article, nous apporterons quelques réponses à cette affirmation dubitative et sceptique.
 La convergence de l’Islam avec la science et la civilisation :
L’existence des affinités et de la parenté entre la religion d’une part, et la culture et la civilisation de l’autre, est un fait incontestable. En effet, ces trois facteurs s’assemblent pour donner forme à la géométrie de l’existence et de la vie humaine. La convergence entre la religion et la civilisation est fortement confirmé par le philosophe et historien David Hume, « Si nous négligeons le facteur de la religion dans les recherches sociales, nous serons amenés à abandonner une grande partie de l’histoire, de la civilisation et du patrimoine culturel des sociétés humaines. » Par ailleurs, selon certains orientalistes, il n’y aurait ni culture ni civilisation dans une population humaine, sauf si une représentation et une forme de la religion y existent.
L’historien français, Fustel de Coulanges, avait montré dans ses synthèses systématiques des périodes les plus anciennes de l’histoire humaine, que la civilisation des sociétés humaines était sous l’influence décisive et déterminante de la religion. Pour mieux comprendre l’influence de la religion sur les progrès scientifiques et culturels des adeptes d’une religion donnée, il faudra d’abord essayer de se familiariser avec les fondements théoriques qui se dégagent, en fait, des textes traditionnels d’une religion. En ce qui concerne la religion musulmane, ces fondements théoriques sont tirés du noble Coran, de la Sunna (tradition) du vénéré Prophète (SA) et des récits et de la conduite de l’Ahlulbeit (vénérés descendants infaillibles du Prophète), et enfin des opinions de leurs disciples sages et avisés.
Le Coran, le rationalisme et la lutte contre l’obscurantisme :
Un regard général sur les enseignements du noble Coran nous montre clairement que le Livre saint appelle les êtres humains à l'apprentissage et à l'acquisition des sciences, et les encourage à œuvrer ensemble dans le sens de la prospérité de la terre. Le premier mot de ce livre céleste, révélé au messager de Dieu, est un commandement qui consiste à exhorter à « lire » et à « apprendre par la plume ». Bien que le rejet de la discrimination parmi les humains, sous toutes ses formes, soit un principe inchangeable du noble Coran, il est à noter que le Livre saint dit explicitement que les savants et les ignorants ne sont pas égaux aux yeux du Créateur. Les mots comme la raison, l’argument, la pensée, la compréhension et la jurisprudence, et leurs dérivés ou synonymes dont le nombre s’élève à soixante-dix, sont très fréquemment utilisés dans le texte coranique, de sorte que nous pouvons appeler le noble Coran le « Livre de la raison et de la pensée ». Le saint Coran est un livre rationnel qui lutte contre l’obscurantisme, et il désavoue et désapprouve fortement les comportements déraisonnables des humains. Marracci qui avait traduit pour la première fois le texte intégral du noble Coran en latin, s’exprime sur la rationalité du saint Coran en ces termes : « Je suis convaincu que si l’on propose à une personne non croyante [non chrétien] de lire le Coran et l’Evangile; elle choisira sans aucun doute le premier. En réalité, le Coran souffla une nouvelle âme dans le corps agonisant des terres conquises, et y créa une nouvelle ambiance favorable au développement des sciences et de la culture. » Selon le défunt Ahmad Aram, « Dans le Livre céleste, à des occasions variées, l’être humain est appelé à penser, à méditer et à se servir de la raison pour découvrir les secrets de l’univers. Dans le texte coranique, les expressions suivantes se répètent à de nombreuses reprises : ‘Ne comprenez-vous donc pas ?’ ( افلا تعقلون ), ‘Peut-être se rappelleront-ils ?’ ( لعلهم يتذكرون ), ‘Ne vous rappelez-vous donc pas ?’ ( يتذكرون افلا ), ‘Et puis regardez’ ( فانظروا ), etc. Se sont tous des commandements à l’adresse des musulmans afin de les exhorter à penser et à méditer à propos des créatures. Ils sont, en fait, le début de la science et de la connaissance. Dans quel autre livre, la supériorité des savants par rapport à ceux qui ne savent pas, a-t-elle été mieux décrite que dans le Coran ? ‘Est-ce qu’ils sont égaux, ceux qui savent, et ceux qui ne savent pas ?’ ( هل يستوى الذين يعلمون و الذين لا يعلمون ) (Sourate XXXIX, verset 9) Dans quel autre livre, la sagesse et le savoir ont-ils été loués mieux que dans le saint Coran ? ‘Et à qui la sagesse est donnée, vraiment, c’est un bien immense qui lui est donné.’ ( و من یؤت الحکمه فقد اوتی خیرا کثیرا ) (Sourate II, verset 269) »
En réalité, c’était le noble Coran qui a attiré pour la première fois l’attention des musulmans sur la question de la philosophie de la création et de la finalité de l’existence. C’était le saint Coran qui a ouvert pour eux une voie vers la découverte des secrets cachés de la création, en leur rappelant les signes de la puissance et de la sagesse du Seigneur. Bref, c’était le noble Coran qui a permis aux croyants d’affranchir leur premier pas décisif vers le progrès scientifique. Bien qu’au début, les sciences et les connaissances des musulmans soient limitées aux sciences religieuses, les musulmans sont aussitôt entrés, au IIe siècle de l’hégire, dans la période d’un grand mouvement scientifique. Pendant cette époque, les savants musulmans ont exploité l’héritage scientifique d’autres nations, et en deux siècles (du milieu du IIe siècle jusqu'à la fin du IVe siècle de l’hégire), ils ont appris l’essentiel des acquis et des expériences scientifiques des autres nations et civilisations. A partir de là, les savants musulmans se sont mis, à la lumière des enseignements du noble Coran, à effectuer des expériences scientifiques et à rénover les sciences. Par conséquent, nous pouvons dire que l’attention portée par les musulmans aux sciences était due au sentiment de curiosité que le Coran et les enseignements de l’Islam avaient effectivement éveillée en eux.
Le célèbre exégète égyptien, le cheikh Tantawi a estimé que près de 750 versets du saint Coran sont directement liés aux sciences. Or, le nombre des versets relatifs aux principes des la charia dépasse à peine le chiffre 400. Ceci étant dit, nous apprenons que le noble Coran utilise la même voie qu’il avait exploitée pour éveiller dans l’esprit des humains l’idée de l’unicité de Dieu, pour conduire les hommes vers le chemin des sciences et de la découverte des vérités du monde de la création, afin que cela soit un fondement solide de leur civilisation.
L’Allameh Tabatabaï décrit l’influence du saint Coran dans le progrès et le développement de la culture universelle à travers le monde, en ces termes : « Force est de constater que les motivations culturelles que le noble Coran avait données aux musulmans, étaient sans aucun doute les principaux éléments incitant les croyants à s’occuper de l’apprentissage des sciences rationnelles, des sciences naturelles, des mathématiques, etc., d’abord sous forme de la traduction et de la transmission des savoirs, ensuite sous forme de l’innovation et de l’expérience scientifique autonome … Il est évident que le progrès et le développement de la grande civilisation islamique, peu de temps après l’hégire et le trépas du vénéré messager de Dieu (SA), et la domination des musulmans sur une grande partie du monde, étaient dus aux enseignements du saint Coran, et cela jusqu’à nos jours, où la population musulmane représente plus de 600 millions d’âmes. Il est clair que cette évolution profonde était un maillon important de la chaîne des événements décisifs de l’histoire universelle, et qu’elle a eu une influence irréfutable sur les événements ultérieurs. C’est la raison pour laquelle, il faut affirmer que le noble Coran restera, comme dans le passé, l’une des causes des évolutions universelles et un facteur décisif du développement et du progrès de la culture mondiale. »
La quête des sciences est une pratique de dévotion :
Outre le noble Coran, la Sunna du vénéré messager de Dieu (SA) – réunissant ses hadiths et les récits de sa vie, appelle les musulmans à apprendre les sciences et à acquérir les connaissances. En réalité, dans un pays où le nombre des personnes capables de lire et d’écrire dépassait à peine le nombre des doigts des deux mains, le Prophète révélé par le Seigneur a appelé les gens à acquérir les sciences, même si cela nécessiterait de longs voyages dans les contrées lointaines. Selon la Sunna du vénéré Prophète de l’Islam (SA), la quête des sciences est une obligation pour tout individu musulman, « du berceau au tombeau ». De même, le messager de Dieu avait confirmé lui-même que l’objectif de sa mission prophétique était d’« éduquer » les humains. En réalité, le vénéré Mohammad _que le salut de Dieu soit sur lui et sur ses descendants_ avait réparti les sciences en deux branches des sciences religieuses ( علم الادیان ), et sciences des corps ( علم الابدان ), afin d’attirer l’attention des musulmans sur l’importance de l’apprentissage des sciences qui serait utiles et bénéfiques pour leurs âmes et pour leurs corps. Dans l’optique du vénéré Prophète de l’Islam, « la plume des savants est plus vertueuse que le sang des martyrs » (مداد العلماء افضل من دماء الشهداء ). A ce propos, Sigrid Hunke a écrit : « En disant que la plume des savants est plus vertueuses que le sang des martyrs, le vénéré Mohammad (SA) n’a-t-il pas fait une remarque que si quelqu’un l’avait répétée à Rome, il aurait été jugé comme athée devant un tribunal religieux ? »
Dans un passage intitulé « la quête de la science est une pratique de la dévotion », Sigrid Hunke écrit : « Le Prophète Mohammad (SA) conseillait instamment à tous les musulmans, hommes et femmes, de se mettre en quête des sciences, de sorte que nous pouvons considérer ce conseil comme une obligation religieuse pour les musulmans … Pour le vénéré Mohammad (SA) et pour les musulmans, la connaissance scientifique de l’univers, de la nature et des merveilles de la création et la compréhension de ses lois, pouvait consolider et approfondir la foi religieuse. Contrairement aux chrétiens, la quête des sciences n’était pas interdite pour eux. Par contre, ils considéraient la science comme un flambeau éclairant à la fois le chemin de l’humanité vers le progrès, la vie prospère et la foi … Selon la vision du monde musulman, toutes les sciences viennent de la part du Seigneur et guident les humains vers Lui. C’est la raison pour laquelle le vénéré Prophète de l’Islam (SA) dit aux musulmans : ‘Faites la quête de la science quelle que soit sa source’. Voilà comment l’Islam autorise les fidèles à apprendre les sciences, pour obtenir la satisfaction du Seigneur, quelles que soient son origine ou sa langue, même s’il faut les apprendre par l'aide des infidèles. »
A la lumière des enseignements de l’Islam, les musulmans tenaient de respecter même les savants qui étaient adeptes d’autres religions que l’Islam. D'après John Dion Port, le calife abbasside Mamoun avait nommé un savant chrétien à la tête d’une école à Damas. Quand certains gens ont critiqué cette nomination, Mamoun leur a répondu : « Je ne l’ai pas choisi pour qu’il soit leur guide spirituel et religieux, mais pour qu’il y enseigne les sciences naturelles. »
A ce propos, l’histoire des relations scientifiques entre Seyed Razi, célèbre savant musulman, avec le savant sabéen Anou Is’haq. Quand des gens critiquaient Seyed Razi pour avoir établi des relations scientifiques avec Abou Is’haq, il leur répondait : « Mes liens avec lui ne sont pas religieux, mais scientifiques et humains. » Il est intéressant de savoir qu’après la mort d’Abou Is’haq, Seyed Razi a composé une élégie pour rendre hommage à son statut de savant. Selon les récits historiques, chaque fois que Seyed Razi passait devant le cimetière, il descendait de sa monture, pour rendre hommage au souvenir de son collègue savant, et à travers lui à la science.
La tolérance des musulmans dans leurs relations avec les adeptes d’autres religions, et surtout le respect qu’ils exprimaient pour les savants non musulmans, avait favorisé la formation d’un Etat musulman fondé sur les enseignements coraniques et loin de toute sorte du fanatisme, afin que l’humanité puisse ouvrir une voie vers le progrès et le développement. La culture religieuse des musulmans accordait une importance toute particulière au respect et à la révérence envers les savants. Un poète musulman a écrit : « Dès que je rencontre un savant, je tiens à m’agenouiller et à embrasser la poussière sous ses pieds. »
Selon les documents découverts par les historiens et les chercheurs de l’Antiquité iranienne, les mages zoroastriens n’enseignaient leur livre religieux ‘Zend’ qu'à leurs proches et à quelques initiés, en se fondant sur la croyance selon laquelle Ahura Mazda (Seigneur de Sagesse) avait demandé à Zoroastre. Or, en Islam, l’apprentissage et l’éducation sont considérés à la fois comme obligation religieuse et acte de dévotion. N’est-ce pas que la culture religieuse des musulmans était fondée sur le principe suivant: « la quête de la science est un devoir pour tous les musulmans » (طلب العلم فريضة على كل مسلم ) ? N’est-ce pas que l’obligation pour tous les musulmans se de mettre en quête des sciences avait préparé le terrain à l’apparition des centaines de grands savants comme Farabi, Avicenne, Khawarizmi et Nassireddine Toussi ?
Par ailleurs, l’Islam est la religion qui donne supériorité et vertu à une heure de réflexion et de contemplation, par rapport à une année d’œuvres de dévotion ; car selon la vision du monde musulmane, à la lumière d’une pensée juste et de bon sens, il serait possible de parcourir le chemin de longues années en un jour. Que c’est beau de voir que l’Islam condamne et réfute la flatterie et l’adulation ; mais qu’il les autorise lorsqu’elles sont pratiquées pour acquérir les sciences.
Outre les hadiths du vénéré Prophète de l’Islam (SA) qui encourageaient les musulmans à l'apprentissage des sciences, il faut savoir que la Sunna pratique du Prophète et son enseignement comportemental était également très riche dans ce même domaine. Un jour, le messager de Dieu est entré dans la mosquée, et il a vu deux cercles de ses adeptes et compagnons, formés l’un à côté de l’autre. Le premier cercle célébrait la prière, tandis que les gens réunis dans le second cercle discutaient des questions scientifiques. Le messager de Dieu (SA) a dit que les deux pratiques étaient vertueuses et louables, mais il a donné la priorité à la discussion scientifique et il a rejoint ses adeptes qui étaient en train de discuter de la science. C’est dans cette même vision d’accorder de l’importance à l’acquisition des sciences, qu’après la victoire dans la guerre de Badr, le grand Prophète de l’Islam a dit que les prisonniers de guerre seraient libérés s’ils apprenaient chacun à dix musulmans de lire et d’écrire. Plusieurs siècles plus tard, en suivant cette leçon tirée de la Sunna du vénéré messager de Dieu (SA), les musulmans ont fixé aux prisonniers de guerre chinois amenés à Samarkand, de pratiquer leur métier dans cette ville pour obtenir plus tard leur libération. En effet, ces Chinois connaissaient les techniques de la fabrication du papier. Ils ont alors construit un atelier de papeterie à Samarkand et les musulmans ont appris leur métier. Ainsi, Samarkand est devenu peu à peu un centre important de fabrication du papier. En tout état de cause, le noble Coran a mobilisé les pensées et les capacités intellectuelles de ses adeptes pour les amener à penser. Dans le même temps, les hadiths du vénéré Messager de Dieu (Sa) préparaient l’esprit des musulmans à recevoir les sciences et les savoirs-faire de leur temps.
La part des musulmans dans le progrès des sciences :
Pendant les premiers siècles de la période islamique, notamment du IIe au Ve siècle de l’hégire, le monde de l’Islam a connu son âge d’or. En prenant le saint Coran pour leur axe principal, et en se soumettant aux enseignements du vénéré Prophète (SA), et en s’appuyant sur les expériences et les acquis scientifiques de l’Orient et de l’Occident, combinés aux instructions sacrées de l’Islam, les musulmans ont réussi à déclencher d’importants mouvements scientifiques et culturels. Les grandes villes du monde de l’Islam sont devenues les véritables cités des sciences et de la culture, où les savants venaient présenter leurs dernières découvertes ou innovations scientifiques. Cet esprit de tolérance islamique et la culture religieuse des musulmans ont amené de nombreux savants occidentaux, qui fuyaient le fanatisme des successeurs de Justinien Ier, à chercher refuge dans les pays musulmans. Après la fermeture des académies de philosophie et de médecine à Odessa et à Nisibe (actuelle ville turque de Nusaybin), les maîtres et les élèves de ces écoles se réfugiaient en Iran ou en Arabie. A Médine, de nombreux savants et chercheurs s’étaient réunis autour du vénéré Imam Sadeq _béni soit-il_. Dans son ouvrage, l’historien musulman Nadjachi a cité Hassan ibn Ali al-Wacha qui a relaté avoir vu dans une mosquée de Médine (probablement la mosquée du Prophète) la réunion de neuf cents cheikhs. Dans leurs discussions scientifiques, ces cheikhs citaient tous les propos et leçons qu’ils avaient appris auprès du vénéré Imam Sadeq (béni soit-il). De nombreux historiens et biographes, dont Ibn Khalakan, ont confirmé que Jaber ibn Hayan, fondateur des sciences chimiques dans la civilisation musulmane était lui-même un disciple du vénéré Imam Sadeq. Il est également l’auteur d’un livre de mille pages, réunissant cinq cents textes scientifiques de l’Imam Sadeq.
La mosquée est l’un des symboles les plus significatifs de la religion musulmane. Avant la création des premières écoles, les mosquées constituaient les lieux privilégiés de l’apprentissage des sciences, partout dans le monde de l’Islam. Aujourd’hui encore, la mosquée est le lieu de rencontre des maîtres et des élèves et de leurs discussions savantes. Outre les mosquées, les maisons et les résidences des vénérés imams infaillibles, et plus tard les villes où se trouvent les saints mausolés de l’Ahlulbeit, sont devenus les centres les plus importants des oulémas chiites et de l’apparition des grandes écoles théologiques chiites surtout dans les villes saintes de Nadjaf, Karbala, Kazemein, Samarra en Irak, ainsi que Meched et Qom en Iran.
Gustave Lebon qualifie de « surprenant », l’effort des musulmans pour apprendre les sciences. Lebon considère les musulmans comme les pionniers des sciences et il écrit : « Dès que les musulmans conquéraient une ville, leur première entreprise était d’y construire des mosquées et des écoles. » Parmi les centres scientifiques les plus importants du monde de l’Islam, pendant les premiers siècles de la civilisation musulmane, il faut citer Beiy al-Hikmah (Maison de la sagesse) des Abbassides, Dar al-Elm (Edifice des sciences) des Fatimides en Egypte, et les écoles scientifiques des chiites dans plusieurs villes, surtout dans le quartier Karkh de Bagdad où vivaient des savants issus de différentes races, religions et nationalités. En outre, les écoles « Nizamiyeh » – bien qu’elles soient exclusivement consacrées à l’enseignement chaféite – avaient formé de nombreux grands savants du monde de l’Islam. La présence des penseurs et des savants de différentes races et de différentes confessions religieuses, dans les grandes écoles du monde de l’Islam, témoigne de la domination d’une culture religieuse, s’appuyant sur les affinités et les points communs des différentes écoles islamiques, en essayant de réduire au minimum les divisions et les différends qui pourraient exister entre elles.
Pendant cette période, la plupart des savants experts en matière des sciences empiriques faisaient leurs études dans les écoles religieuses du monde de l’Islam. En réalité, pendant les premiers siècles de la période islamique, il n’y avait pas une distinction nette et formelle entre les lieux d’enseignement des sciences religieuses et des sciences empiriques ; et ce d’autant plus que les savants qui se spécialisaient dans les sciences empiriques, étaient en même temps savants religieux ou fins connaisseurs des sciences islamiques.
L’écriture et la production d’œuvres écrites sont des indices de la civilisation et du niveau du développement des peuples. Les bibliothèques du monde de l’Islam étaient remplies de livres dont la plupart n’existaient guère dans les bibliothèques occidentales de l’époque. Les livres qui ont été consacrés à la culture et à la civilisation islamique confirment tous cette réalité.
La religion et les sciences des musulmans :
L’influence de la culture religieuse sur le progrès de certaines sciences dont l’astronomie est irréfutable. Pour les musulmans, l’astronomie était pleine de profondes significations religieuses. Une fois, plusieurs hommes religieux ont demandé à deux astronomes qui étaient en train d’étudier l’Almageste : « Que lisez-vous donc ? » Ils ont répondu : « Nous sommes en train de lire un commentaire du noble Coran qui dit : ‘Ne regardent-ils donc pas les chameaux comme ils ont été créés, et le ciel comme il est élevé, et les montagnes comme elles sont dressées ?’ » (افلا ينظرون الى الابل كيف خلقت و الى السماء كيف رفعت و الى الجبال كيف نصبت ) (Sourate LXXXVIII, versets 17-19)
Pour organiser les prières quotidiennes, l’Islam préconise l’observation permanente des changements astronomiques, car ces prières doivent être célébrées à des moments précis du jour et de la nuit. Cela a conduit des savants comme Biruni, Ibn Younes et les autres à inventer des instruments précis pour déterminer les heures des prières. Outre les prières quotidiennes, la détermination du début et de la fin du mois béni de ramadan, et le moment précis du lever et du coucher de soleil, sont nécessaires pour organiser le jeûne. Par ailleurs, les musulmans avaient besoin des moyens scientifiques leur permettant de prévoir les éclipses solaires et les éclipses lunaires, car ces informations étaient également nécessaires pour les prières qui sont célébrées à l’occasion des événements naturels. Et enfin, il faut rappeler que les musulmans avaient besoin des connaissances géographiques pour déterminer la direction de la Maison de Dieu à la Mecque, vers laquelle ils doivent se mettre debout au moment de la prière. Bien que le développement des connaissances géographiques et astronomiques contribuait considérablement au progrès des sciences dans le monde de l’Islam, il faut savoir que les musulmans rejetaient pourtant l’astrologie (détermination du caractère et du destin des hommes par l'étude des influences astrales ou des aspects des astres) en tant que croyances superstitieuses. Néanmoins, le rejet de l’astrologie n’a pas amené les musulmans à réfuter la science astronomique, et ce d’autant plus que les savants musulmans développaient les observations pour établir les tables astronomiques de plus en plus précis.
A la lumière de la culture islamique, la géographie a fait des progrès considérables. De nombreux ouvrages géographiques ont été rédigés par les savants et les explorateurs musulmans qui considéraient les villes saintes de la Mecque et de Médine comme repères, et ce en raison du pèlerinage annuel du Hadj qui réunissait les pèlerins venant des pays différents, dans ces deux villes saintes de l’Islam. Les géographes musulmans étaient les pionniers de cette discipline pendant des siècles. La mappemonde représentée par Abou Abdallah Idrissi a été longtemps la référence la plus importante des géographes européens.
La chimie, en tant qu’une discipline scientifique à part entière, est sans aucun doute une invention des savants musulmans. Selon Ibn Khalakan, Jaber ibn Hayan qui était un disciple du vénéré Imam Jaafar Sadeq _béni soit-il_, était l’auteur d’un ouvrage de deux mille pages en chimie. Gustave Lebon a mis l’accent sur les innovations des savants musulmans dans la chimie, et écrit : « Dans l’histoire des sciences, Lavoisier est souvent présenté comme le fondateur de la chimie. Or, aucune science n’apparaît d’un jour à l’autre par un seul homme. Il y a mille ans, les chimistes musulmans avaient élaboré des expériences et des découvertes chimiques très importantes, et sans leurs acquis, Lavoisier n’aurait certainement pas pu faire avancer la chimie moderne. »
Ibn Heysam (354-430 de l’hégire) était le plus grand physicien musulman, connu en Occident sous le nom d’Alhazen. Le livre le plus célèbre d’Alhazen était intitulé « La science des paysages », la référence la plus importante de l’optique pendant le Moyen-Âge. Son œuvre a eu une vaste influence sur les travaux des savants musulmans et ensuite sur les essais d’optique de Roger bacon ou de Kepler. Ibn Heysam (Alhazen) avait effectué aussi des recherches et des autopsies sur les maladies oculaires.
Les inventions des savants musulmans témoignent de leurs grand désir pour apprendre les sciences et les techniques : l’invention de l’imprimerie, l’invention de la boussole, la découverte de la formule de la poudre, la découverte du système de la circulation du sang, le développement des techniques de la fabrication du papier, et des dizaines d’autres découvertes et inventions. L’histoire des sciences dans le monde de l’Islam est jalonnée par les noms des grands savants comme : Jaber ibn Hayan (103-200 de l’Hégire), al-Kindi (185-260 de l’hégire), Honain ibn Is’haq (194-263 de l’hégire), Sabet ibn Qoreh (211-288 de l’hégire), Khawarizmi (décédé en 249 de l’hégire), Rhazès ( 251-313 de l’hégire), Farabi (258-339 de l’hégire), Massoudi (décédé en 345 de l’hégire), Avicenne (370-428 de l’hégire), Alhazen (354-430 de l’hégire), Biruni (362-442 de l’hégire), Averroès (520-595 de l’hégire), Nassireddine Toussi (597-672 de l’hégire), et des dizaines d’autres grands savants musulmans qui comptent tous des figures de proue de l’histoire universelle des sciences. Chacun de ces grands savants s’étaient, en fait, spécialisés dans plusieurs disciplines scientifiques. Leurs œuvres ont grandement contribué au développement des sciences en Occident, où certains de leurs ouvrages font encore l’objet d’études.
Les aveux des auteurs de l’histoire de la civilisation :
Les auteurs occidentaux des différents ouvrages sur l'histoire de la civilisation confirment unanimement le rôle de la civilisation islamique dans le progrès et le développement de la civilisation européenne, admettant que l’essor de l’Occident était dû aux acquis de la culture supérieure des musulmans. Ces auteurs rejettent l’idée selon laquelle les musulmans aient seulement absorbé les éléments existant dans les autres civilisations. Ils affirment alors que les musulmans avaient certainement reçu les acquis d’autres civilisations, mais qu’ils y avaient rajouté beaucoup. Jurji Zaydan écrit que les nouvelles recherches réalisées par les savants musulmans avaient donné une nouvelle vie aux sciences anciennes, pour s’adapter au climat général et aux besoins de la civilisation musulmane. Ernest Renan dit qu’il serait impossible de négliger la part très importante des musulmans dans le progrès et le développement des sciences. Renan écrit : « Les musulmans ont traduit et commenté tout ce qu’ils avaient hérité, et ils y ont rajouté des analyses très précieuses. Ce qui est plus important, c’est que les musulmans étaient eux-mêmes producteurs des sciences, et ils ont formé des cerveaux originaux. »
Certains auteurs vont plus loin jusqu’à dire que l’Europe est redevable à la civilisation musulmane ; car au-delà de l’abolition du féodalisme en Europe, et la disparition des despotismes aristocrates, et l’établissement des grands monuments de la liberté sur leurs ruines, l’Europe devra se rappeler qu’elle est aussi redevable aux adeptes du vénéré Mohammad (SA), parce que les musulmans avaient fait le relais entre la littérature ancienne et la littérature moderne. Pendant la longue période où l’Europe vivait dans les ténèbres, les musulmans ont préservé les œuvres des philosophes grecs, ils ont développé et diffusé les sciences naturelles, les mathématiques, la médecine, et les autres sciences.
Compte tenu de tout ce que nous venons de dire à propos du rôle de la civilisation musulmane, comment pourra-t-on négliger le rôle de la culture religieuse des musulmans dans le progrès et le développement scientifique sur une échelle mondiale ? Sigrid Hunke écrit que de nombreux médicaments et divers produits que les Européens consomment quotidiennement ont encore des noms arabes, et qu’ils auraient été inventés pour la première fois par les musulmans, dans les pays islamiques. Selon lui, ces noms revivifient tous les jours le souvenir de la civilisation musulmane.
En conclusion, nous tenons à nous adresser aux soi-disant musulmans qui s’opposent à la religion, pour leur dire que même l’athée Voltaire qu’ils considèrent comme leur source d’inspiration, s’est excusé de ses insultes contre le vénéré Prophète de l’Islam (SA), après avoir connu la religion musulmane. Voltaire avait écrit : « La religion de Mohammad (SA) est la religion rationnelle, sérieuse, pure et humanitaire. » Et il a poursuivi : « J’ai été injuste envers le Prophète des musulmans. » Pour avoir un jugement correct, il suffirait peut-être que l’on ait un peu de justice et d’impartialité, afin que l’on ne tombe pas dans le piège des préjugés et des jugements de deux poids deux mesures.
 
 

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