La philosophie de l’Imâmat chez Mollâ Sadrâ

Allusion poétique :
Hâfez az dast madeh dowlat-e in kashti-ye Nûh
Var na tûfân-e havâdes bebarad bonyâdat
Ô Hâfez ! Ne renonce pas à cette fortune de l’arche de Noé
Sans quoi le déluge des évènements emportera tes fondations !
Avant d'entrer dans le vif du sujet, voyons d'abord quelques points préliminaires en guise d'introduction :
L’Imâm est le flambeau lumineux de la guidance et l’Imâmat est l’arche de salut qui préserve du déluge de la vie matérielle. Comme ce sujet fait partie des principes fondamentaux de la foi chiite, les honorables docteurs, les chercheurs et les théologiens se sont toujours attachés à l’étudier et à l’éclaircir.
Il existe beaucoup d’écrits courts et longs, beaucoup de livres de petits et de grands formats au sujet de l’Imâmat, du rang de l’Imâm, des critères permettant de distinguer l’Imâm, de ses qualités, etc. Dans cet article, nous nous proposons de présenter à l’attention de ceux et celles qui s’intéressent à la Famille de l’Impeccabilité (1) (s), une recherche en vue d’éclaircir et d’analyser la notion de l’Imâmat et les qualités des Imâms sur la base des principes qui se dégagent de la théosophie transcendantale (hikmat mota'âliyya) de Mollâ Sadrâ Shîrâzî (2) (que son secret soit sanctifié) (3) .
De par la mise en œuvre homogène des principes des péripatéticiens et des gnostiques musulmans, le Livre de la Théosophie transcendantale plus connu sous le titre de Kitâb al-asfâr al-arba’a (Le livre des quatre voyages) (4) , qui a été composé au Xe siècle de l’Hégire / XVIIe siècle par Mollâ Sadrâ, peut être considéré comme une référence solide et digne de confiance en vue d'éclaircir de nombreuses questions religieuses.
Sur cette base, Mollâ Sadrâ a recouru lui-même à ce principe pour résoudre des difficultés comme la démonstration de l’Être nécessaire, de l’Unicité divine, de la réfutation de l’erreur d’Ibn Kammûna (5) , de la science divine, de l’adventicité du monde, de la résurrection corporelle et d’autres questions. Mais il est certain que les fruits et les effets de cette philosophie sont d’abord perceptibles dans les questions intellectuelles.
Nous allons à présent examiner une des questions principales de la foi chiite sur la base de la théosophie transcendantale : l'explicitation du rang et de la position de l’Imâmat ainsi que des questions corollaires parmi lesquelles :
•    Les référents de chacune des qualités de l’Imâm.
•    La relation de ces qualités avec l’Imâm.
•    La relation de ces qualités entre elles.
…et d’autres points parfois aussi subtils et fins qu’un cheveu.
Il est remarquable que commentant le Kitâb al-Hujja (Le livre de la Preuve) (6) , qui fait partie des « Principes » (Osûl mîn al-kâfî), recueil de traditions chiites compilées par le traditionniste Kulayni (7) , Mollâ Sadrâ ne construise pas son raisonnement sur la base de la théosophie transcendantale, mais sur celle des péripatéticiens. Par exemple, il a commenté la révélation et l’inspiration sur la base de la perfection de la faculté spéculative et sur la supériorité de la faculté de conjecture (hads) qui est une donnée de la philosophie aristotélicienne pratiquée en islam. De même, il a commenté la question de la continuité de l’existence de l’Imâm sans tenir compte des deux arcs de descente et de remontée, mais sur la base de la règle de la possibilité « du plus noble » (ashraf), qui est l'une des règles de la théosophie illuminative ou orientale (8) (hikmat al-Ishrâq), alors que leur explication sur la base de la théosophie transcendantale aurait été plus puissante et plus claire.
Bâ To ân ‘ahd ke dar vâdi-ye ayman bastim
Hamcho Mûsi arini-gûy be mîqât barîm
Ce pacte que nous avons conclu avec Toi dans la « Vallée sûre » (9) , nous ne l'oublierons pas
Et en scandant la prière de Moïse : « Montre-Toi que je Te voie », nous irons jusqu'au lieu de notre rendez-vous
Qu’est-ce que l’Imâmat?
L’Imâm (10) Ali ibn Mûsâ al-Ridhâ (11) (as) a dit : « L’Imâmat possède une valeur plus glorieuse et une position plus grande pour qu’il soit accessible aux esprits des gens, ou qu’il soit appréhendable dans sa signification intégrale par leurs opinions, ou que les hommes se croient en mesure de désigner un Imâm par leur choix ».
Dans la religion chiite, l’Imâmat revêt une importance spéciale puisqu’il est le pivot même de la foi. Pour cette branche de l’islam, le successeur réel du Prophète (s) doit posséder les qualités qui se résument en ces points:
-1. Le rang d’Imâm est dépendant de certaines aptitudes et capacités réelles spécifiques. Ces capacités découlent d’un don et d’une bienveillance de Dieu. Par conséquent, les qualités acquises par les hommes ou la désignation ou l’élection par les hommes ne jouent aucun rôle dans son instauration. (Idem : 518)
-2. Grâce aux secours qui lui parvient de l’Invisible et à l’inspiration céleste, l’Imâm est constamment sous la protection et l’appui divins. C’est ce qui explique que l’Imâm ait bénéficié à chaque époque du degré le plus élevé de science et de conscience et c’est pourquoi il sait où se trouvent les intérêts réels  hommes et les secrets permettant d'assurer leur bonheur dans ce monde et dans l’autre.
(Idem : 518, 552, 556)
-3. L’Imâm est témoin et juge de tous les évènements du monde et du comportement des hommes.
(Idem : 491, 495, 686, 692, 694)
-4. L’Imâm jouit de l’infaillibilité et il est tenu à l’abri de l’erreur et du péché. L’Imâm est par conséquent l’homme le plus croyant, le plus juste de son temps et il se trouve au plus haut degré de la vertu morale et pratique.
-5. L’Imâm peut réaliser des charismes comme des miracles, que ce soit au niveau de la connaissance ou de l’action. (Idem : 920, 924, 1288, 1295, 1299)
-6. Pour une époque donnée, il n’y a jamais qu’une seule et unique personne ayant la compétence pour exercer la charge d’Imâm, de chef suprême de la religion et du monde des hommes.  (Idem : 518, 923)
-7. Tant qu’il y aura des hommes sur terre, le monde ne sera jamais dépourvu d’Imâms. (Idem : 452, 454, 459)
-8. Obéir et suivre l’Imâm dans les actes et les pensées, dans les affaires concernant le monde aussi bien que celles concernant l’Au-delà, auront pour effet l'obtention du salut et du bonheur, alors que la désobéissance et l’opposition à l’Imâm sont des facteurs de malheur et de perdition.
Bases philosophiques des qualités des Imâms (as)
Dans cette section, notre propos est d’exposer les bases de la réalité et de l’identité de ces qualités ainsi que d’examiner pourquoi ces qualités se rattachent les unes aux autres, dans l’existence de l’Imâm.
Le sujet de l’Imâmat et des Imâms a évidemment fait l’objet de discussions dans les ouvrages de théologie musulmane (kalâm), et les qualités nécessaires des Imâms ont aussi été démontrées sur la base de l’argumentation théologique. A titre d’exemple : s’appuyer sur la règle de la Grâce divine (lotf) pour établir la démonstration de l’existence de l’Imâm, s’appuyer sur la tradition prophétique pour établir les qualités des Imâms, ou encore tirer profit des principes théologiques, comme celui de considérer comme « malséant d’accorder la préséance au préférable sur l’éminent », et la démonstration de l’impeccabilité (‘esmat) sur la base de ces mêmes principes.
Mais notre intention dans cet article est d’analyser et d’expliciter les qualités des Imâms et les relations existant entre ces qualités, particulièrement sur la base des principes de la sagesse transcendante de Mollâ Sadrâ.
Pour aborder ce sujet, il est nécessaire de préciser quelques points fondamentaux de cette philosophie.
•    Les degrés sous lesquels se présente le monde :
L’univers de l’être possède des degrés et un ordre de procession de ces degrés. Ces degrés ou cet ordre s’envisagent selon deux directions : l’une est l’arc de la descente et l’autre, l’axe de la remontée.
L’axe de la descente commence après la phase originelle, avec le monde des intelligences pures et des entités immatérielles, puis par le monde imaginal, suivi du monde sensible ou matériel. L’axe de la descente est le concomitant du système de causalité dans le monde de l’être, dans ce sens qu’en raison de la « faiblesse » de chaque effet par rapport à sa cause, tout ce qui se trouve plus loin de l’Origine sera dans un rang plus faible d’intensité de l’être (12) .
Le principe de l’axe de la remontée est un mouvement structurel et substantiel du monde de la matière dont Mollâ Sadrâ a établi la démonstration. Selon le mouvement intra-substantiel (13) , le monde sensible est en train de sortir en bloc de la potentialité à l’acte. Et il va de soi que l’actualité pleine ne s’obtient que par le degré de la dé-matérialité totale. Ainsi, le mouvement du monde matériel entraîne par lui-même un devenir immatériel du monde matériel (14) .
•    L’existence humaine est totalisante (jâmi‘)
Le sujet du passage ou de la transmutation d’un être matériel en un être dépouillé, immatériel, serait inadmissible sans un autre axiome essentiel. Cet axiome est celui de la nature rassemblante, totalisante dans l’unité, de l’existence humaine. C’est l’idée du macrocosme et du microcosme: l’homme est un résumé de l’univers et l’univers est un déploiement de l’homme - principe qui se fonde sur l’idée que le monde a été créé pour l’homme. Un tel principe a pour conséquence que ce dernier porte en lui nécessairement toutes les clefs pour pouvoir le dominer en acte. L’homme est un microcosme, littéralement un petit univers. Et l’univers est un grand homme.
C’est ce qu’ont formulé ainsi les célèbres vers attribués à l’Imâm 'Alî (as) :
Wa tahsabu annaka jarmun saghir
Wa fîka ‘ntawa al-âlam al-akbaru
Tu t’imagines être un petit corps
Alors qu’en toi s’est reployé l’univers immense (15)
De toutes les créatures qui vivent dans l’univers, seul l’homme peut établir une relation entre le monde matériel, celui des corps, et le monde immatériel, celui des esprits. En réalité l’existence de l’homme est un lien, un pont qui rattache entre eux l’ensemble des univers et des différents degrés de l’être. L’homme est le lieu d’un mouvement de la potentialité infinie jusqu’à l’actualité sans limite. Cela signifie donc que dans les limites de l’existence humaine, l’arc de la remontée a pour termes extrêmes le degré le plus bas de l’être d’une part, et le degré le plus élevé, d’autre part.
Le mouvement commence à l’étape la plus faible de l’état inerte jusqu’à son étape la plus élevée, puis de là, transmutation de l’inerte en végétal. Puis le processus de transformation se poursuit du degré le plus inférieur du végétal jusqu’à son degré le plus élevé. De là, passage à l’étape d’animal, et traversée des différents degrés de l’animalité, avant de parvenir au dernier degré de l’existence animale.
Puis intervient alors le passage du monde animal au monde humain. Cette étape est celle de la transformation dans les différentes étapes avant d’obtenir le degré le plus élevé du dépouillement, avec la traversée du monde de la matière, du monde imaginal, et l’arrivée au seuil de Dieu et l’extinction en Lui (fanâ'), puis la subsistance par Dieu (baqâ').
Ces étapes sont décrites par Mowlânâ Rûmî qui les a qualifiées de morts successives dans les vers qui suivent :                 
Az jamâdî mordam o nâmi shodam
vaz namâ mordam be hayvân bar zadam
mordam az heyvâni o Âdam shodam
pas che tarsam ? key ze mordan kam shodam
hamle-ye digar bemiram az bashar
tâ bar âram az malâyek bâl o par
v- az malak ham bâyad jastan ze ju
kullu shay’in hâlikun ellâ vajhah
bâr-e digar az malak qorbân shavam
ânche andar vahm nâyad ân shavam
pas ‘adam gardam, ‘adam chon arghanûn
gûyadam k -innâ ilayhi râji’ûn
Je suis mort à l’état minéral et je suis devenu plante
Je suis mort à l’état de plante et je suis revenu en tant qu’animal
Je suis mort à l’état d’animal et je suis devenu un homme
De quoi aurais-je peur ? Ai-je été diminué par la mort ?
Et je mourrai en l’état d’homme
Pour prendre mon essor avec les anges,
Je devrai franchir même l’état angélique
Toute chose va pour périr excepté Sa face (16)  !
De nouveau, je mourrai à l’état d’ange
Pour devenir ce que nul ne peut imaginer
Puis je deviendrai néant, et le néant me chante à l’oreille comme l’orgue :
En vérité c’est vers Lui que se fait notre retour (17)  ! (18)
C- Le principe de la primauté de l’Être
Selon la doctrine de la « priorité originelle de l’exister » (19) ou de « l'authenticité de l'être » (asâlat al-wujûd), l’être ou l’existence est la source de tous les effets et qualités, car le sens de priorité ne désigne pas autre chose que le lieu de naissance des effets.
En réalité, étant donné que rien d’autre que l’être ne vient à l’existence externe, il s’ensuit que tous les effets et qualités ne prennent leur origine que de l’être. Et comme l’être, ils possèdent une réalité graduelle ou modulée (mushakkak) présentant des degrés nombreux et inégaux.
Par exemple, la vie, la science, la volonté, la puissance, l’action active ou passive… sont des réalités qui sont issues et dérivées de la réalité de l’être. Ces qualités sont inhérentes à l’être et n’en peuvent être dissociées. Car si ces réalités et qualités étaient hors de la réalité de l’être, elles n’auraient aucune réalité en vertu du principe de la priorité originelle de l’être.
Or il n’y a aucune autre réalité que celle de l’être. (20) Par conséquent, la réalité authentique et véritable est l’être même, c'est-à-dire l’existence (al-wujûd). Tous les biens et toutes les perfections sont des effets de l’être. Et comme l’être possède des degrés différents en fonction de son intensité plus ou moins forte, ses effets aussi seront de degrés différents et variables. Par exemple, la science chez l’Être Nécessaire ne sera pas la même que la science chez les intellects ou les âmes. Elle sera plutôt inégale, en fonction de la perfection ou des défauts. Ou encore, le mot science désigne une même signification qui s’applique à l’homme ou à Dieu, mais en Dieu, cette science est infinie alors que chez l’homme elle est limitée.
Ce qui est certain, c’est qu’aucun degré de l’être ne sera dépourvu de ces qualités et effets. (21)
Mais autant ce degré d’être s’affaiblira, autant ces effets et qualités perdront en puissance. Dans ce sens que par exemple, la hylé, (hayûlâ) (22) et la matière des matières, qui du point de vue de l’être, ne possède aucune actualité (fe’liyat), ses effets et concomitants de l’être sont aussi dépourvus de toute espèce d’actualité.
Dans l’étape des êtres inertes, comme l’être est de faible intensité, les effets et concomitants sont également faibles, de telle sorte que leur vie ou leur conscience deviennent imperceptibles pour nous.
Mais chez l’animal et chez l’homme, comme le degré d’être est élevé et puissant, les effets et les concomitants de l’être comme le sens, la motion, la volonté et l’activité sont plus forts et donc plus évidents.
Ces idées peuvent être considérées comme caractéristiques de la philosophie de Mollâ Sadrâ. Ce dernier a également considéré qu’Avicenne et ses partisans étaient dans l’incapacité de les comprendre, mais il admet en même temps que les mystiques ont montré un intérêt pour cette question (23) .
Même les objectifs et les objets d’amour dépendent en intensité de leur degré d’être et sont donc inégaux et variés pour cette même raison (24) . Pour les mystiques aussi, comme l’univers entier et tous les êtres qui y vivent ou s’y trouvent sont les lieux de manifestation de Dieu, chaque phénomène est à sa mesure le lieu de manifestation des qualités et des perfections de Dieu.
Hasti be sefâti ke dar û bovad nahân
Dârad sarayân dar hameh a’yân-e jahân
Har vasf ze ‘eyni ke bovad qâbel-e ân
Bar qadr-e qabûl-e ‘eyn gashte ast ayân
Sous la forme des qualités qui sont cachées en lui
L’être se répand dans toutes les essences de l’univers
Chaque épithète possède une essence qui lui sert de réceptacle
C’est à la mesure de la réceptivité de l’essence qu’il se manifeste. (25)
Par conséquent, chaque espèce parmi les espèces qui participent à l’univers de l’être jouit des effets et des qualités en proportion du niveau dont il jouit des perfections existentielles. Comme le sens, le mouvement et leur manifestation dans l’étape des animaux, ou la perception des idées générales, se réalisent dans le statut humain.
C’est pour cette raison que la capacité d'agir avec un pouvoir divin n’a été donnée qu’aux êtres immatériels, dépouillés de leurs corps. En outre, les corps ainsi que les âmes qui dépendent des corps et qui n'ont pas atteint un degré spécifique de dépouillement sont considérés comme incapables d’agir comme Dieu.
Dans ses œuvres, Avicenne a discuté de l’impossibilité de la causalité d’un corps sur un autre corps, et l’a démontré de façon absolue. Cela veut dire que la capacité d'agir avec un pouvoir divin et ressembler à Dieu n’a pas la possibilité de se réaliser au niveau existentiel des corps. Le corps ne peut être considéré que comme terrain et prédisposition. Les âmes aussi, dans les degrés inférieurs des perfections, ne peuvent intervenir que comme agent naturel.
Néanmoins, dans les degrés supérieurs, elles peuvent recevoir le don d'agir avec la permission divine et conformément à la Volonté de Dieu, comme cela a été affirmé clairement par les mystiques et les philosophes. Dans le chapitre d’Isaac (26) de son Fusûs al-Hikam, Ibn 'Arabî écrit à ce sujet :
« Tout homme crée par l’illusion contenue dans la puissance de son imagination ce qui, sans elle, n’aurait aucune existence ; cela, c’est le cas du commun. Le Connaissant, quant à lui, crée par l’énergie spirituelle ce qui peut avoir une réalisation extérieure au siège de son aspiration. Son énergie préserve alors en permanence (la subsistance de) cette réalité, sans que cette préservation « l’affecte » en aucune manière. Si quelque incident survient, et que le Connaissant néglige d’assurer cette sauvegarde, ce qu’il a créé s’évanouit aussitôt… » (27)
Pour le Shaykh al-Ishrâq (28) , les hommes parvenus à un degré exceptionnel de dépouillement (tajarrod), sont capables de créer une « substance imaginale ». Ce degré est appelé par lui, la station de « sois ! » (kon !) (29) .
L’ordre « sois ! » est une allusion au verset 82 de la sourate 36 (Yâ Sîn) : « Son ordre quand Il veut une chose est de lui dire "Sois !", et elle est ! » (30) . Dans cette station, le connaissant acquiert aussi ce pouvoir, celui d’agir à l'image de Dieu, avec la permission divine.
Avicenne aussi admet comme corollaire nécessaire des âmes des prophètes la possibilité de l’action sur la nature, dans le sens où les âmes humaines touchant à la perfection acquièrent le pouvoir de « disposer à leur guise » (tasarrof) de la nature. Ceci intervient quand l’âme humaine ayant atteint un degré de perfection et de dépouillement outrepasse les limites du corps, devient capable d’influer aussi sur les autres corps et possède la puissance de transformer les éléments et d’influer sur les évènements. De façon générale, sa volonté se réalise dans le monde de la nature (31) . De même, les autres qualités, comme par exemple la science et la volonté, varieront en fonction des degrés de l’être.
Pour le Shaykh al-Ishrâq, l’acquisition des connaissances relatives à la sagesse est impossible sans l’obtention préalable de la capacité de quitter volontairement et temporairement son corps. Il rejoint en cela al-Ghazzâli pour qui la connaissance gnostique exige une transformation intérieure. (32)
De son côté, Mowlânâ Rûmî est revenu sur ce point à maintes reprises dans son œuvre. Il emploie des expressions comme :
Jân shô o, az râh-e jân, jân râ shenâs
Deviens une âme et, par le moyen de l’âme, connais l’âme
(Mathnawî Ma’nawî ; Cahier 3 : Section 155, vers 19)
Ou :
Az jamâdî dar jahân-e jân ravîd…
De l’état inerte dans ce monde, allez au monde des âmes !
(Mathnawî Ma’nawî ; Cahier 3 : Section 41, vers 51)
Ou :
Pas qiyâmat shô qiyâmat râ bebîn
Dîdan-e har chîz râ shart ast în
Deviens la résurrection, et vois la résurrection :
C’est la première condition pour « voir » toute chose
(Mathnawî Ma’nawî ; Cahier 6 : Section 23, vers 34)
Bahmanyâr (33) s’appuie sur Aristote pour dire que parvenir à la sagesse et comprendre la métaphysique équivaut à naître une seconde fois.
Mollâ Hâdî Sabzevârî (34) , discutant de la puissance de Dieu, affirme que l’existentiation (îjâd) est la résultante et la dérivée de l’être et dit :
« De même que les possibles sont dotés d’un degré faible d’être, ils sont aussi dotés d’un degré faible de volonté et (de pouvoir) d’existentiation. »
En tenant compte des notions préliminaires déjà évoquées, dans l’existence humaine, qui est appelée un « être total » (kawn-e jâme’ ou microscome), la démarcation entre l'immatériel et le matériel se rompt. Cela signifie qu'au travers du parcours de l’homme, la matière devient progressivement immatérielle. Ainsi, toutes les étapes de l’existence humaine, des étapes les plus faibles du monde de la matière aux étapes les plus élevées du monde immatériel, deviennent susceptibles d’être réalisées.
Un tel arc de la remontée n’est pas facile à démontrer ou à justifier, même en se fondant sur la possibilité de la graduation dans la substance. Mais l’acceptation du mouvement dans la substance (al-harikat al-jawhariyya) et de la gradation dans l’être (tashkîk al-wujûd) rend aisée cette explication et cette justification.
En tenant compte des points qui ont été évoqués jusqu’ici, les qualités, les spécificités et les effets de tous les degrés et étapes de l’être ont la possibilité de se manifester dans l’existence d’un individu parmi les individus du genre humain. Sur la base de sa qualité d’être complet ou totalisant (kawn-e jâme’) et du mouvement intra-substantiel, chaque individu de l’espèce humaine, embrasse et domine en son être tous les degrés et étapes, depuis les plus bas jusqu’aux plus élevés.
Nous en concluons que tous les phénomènes survenant au cœur de l’être se trouvent sur la voie de la perfection. Mais cette perfection ne peut être atteinte que dans l’existence de l’homme, par un état de « séparation » ou d’immatérialité, c’est l’actualité absolue.
D. L'atteinte de l'immatérialité, but ultime du mouvement
Comme sur la base du mouvement intra-substantiel, l’ensemble du monde matériel est en mouvement, que tout mouvement nécessite également une sorte d’intensité et de perfection, et que le principe du mouvement est de sortir de l’état potentiel à l’état actuel, il s’ensuit que le but ultime du mouvement est de parvenir à l’actualité qui consiste justement dans le dépouillement de la matière ou l’immatérialité (tajarrod).
C’est pourquoi l’ensemble du monde matériel se dirige en direction de la « séparation ». Cependant, ce devenir n’aboutit à l'immatérialité qu'au travers du parcours existentiel de l’homme. Les autres êtres ne peuvent participer à cela qu'au travers de leur mort et du transfert de leurs réalités existentielles dans le domaine d’existence de l’homme – lorsque l'homme mange telle plante ou tel animal, par exemple. En réalité, le but du mouvement de toutes les autres espèces est de parvenir au degré de l’homme, alors que le but de l’existence humaine est de parvenir à la pure spiritualisation, au dépouillement total, de façon à retourner à Dieu.
Le Shaykh al-Ishrâq rapporte également des paroles de Bouddha et des anciens sages de l’Orient selon lesquels l’apparition de l’âme et de la vie n’était possible qu’en l’homme. La vie est passée de l’homme aux autres espèces par transmigration (tanâsokh). (35)
C’est sans doute cette particularité qui a conféré une sacralité spéciale à la vie humaine. Tuer tout animal relevant de chacune des espèces du monde matériel n’a pas la même gravité que celle de tuer un être humain.
Par conséquent, l’homme, bien qu’étant un être matériel, possède aussi la capacité de traverser la frontière de la matière. Car dans l’existence humaine, il est possible de naître deux fois. Du ventre de la mère, un être nu vient au monde, et avec cette naissance, le mouvement permanent de la matière parvient à un résultat. Si nous considérons ce résultat, nous verrons que si le mouvement prenait son élan de la nature, il serait un mouvement vain et sans but. Et lorsque cette deuxième naissance se réalisera, l’homme aura en réalité traversé la frontière de la matière. Une telle chose est possible pour tous les êtres humains quand ils remplissent certaines conditions nécessaires. Cela signifie que « tous les corps sont (rendus) enceints des âmes.. »
Rûmî dit :
Tan hamcho Maryam ast o har yeki ‘Isâ-yi dârim, agar mâ râ dard peydâ shavad,‘Isâ-ye mâ bezâyad.
Le corps est pareil à Marie, et chacun de nous possède en lui un Jésus. Si nous éprouvons en nous cette douleur, notre Jésus naîtra.
(Le Livre du Dedans, section 5, page 47) (36)
Et aussi :
Tan cho mâdar, tefl-e jân ra hâmeleh
Marg, dard-e zâdan ast o zelzeleh
Le corps est comme la mère enceinte de l’enfant de l’âme
La mort, c’est la douleur de l’accouchement et un séisme
(Mathnawî Ma’nawî ; Cahier 1 : Section 165, vers 16)
On a le sentiment que dans sa propre existence, Rûmî a fait l’expérience pratique d’un tel enfantement, car il dit aussi :
Dard chon abestanân mi- giradam
Tefl-e jân andar chaman mi- âyadam
Quand je me roule de douleur, je sens que je vais donner naissance
Et l’enfant de mon âme vient gambadant dans le pré
(Dîvân-e Shams, Ghazaliyât ; 1662 : 3)
Il est évident qu’ici la mort dont il s’agit est la mort volontaire. En termes gnostiques, on l’appelle fanâ', extinction, et baqâ', subsistance après l’extinction. Le propos ici est que dans son parcours vers la perfection, l’homme accède à un degré supérieur de l’être. Et comme il pénètre dans une étape supérieure et plus accomplie, il est normal qu’il obtienne des caractères et des effets nouveaux plus appropriés à cette étape.
Chaque fois que le degré d’être sera un degré sortant de l’ordinaire, ses caractéristiques et ses effets seront extraordinaires et miraculeux. Et c’est ici que se conjoignent la connaissance ayant atteint la limite du miracle (l’Inspiration et la révélation), la limite de l’action et de l’impact (par les miracles et les charismes), la limite de la volonté et du comportement (caractère sublime et impeccabilité). Mais cette jonction et cette rencontre ne sont pas un effet subjectif ou métaphorique mais bien une réalité, et un état supérieur de l’être en acte. C’est une unité nouvelle dotée d’une énergie de liaison qui la rend à jamais insécable, et ses composantes indissociables. Elle ne fait pas partie des vœux pieux, elle est bien un être réel ayant une identité propre. Cet être est le fondement philosophique de la liaison qui existe entre les qualités des Imâms (as) avec l’existence de l’Imâm, et aussi le lien entre les qualités elles-mêmes.
Explication philosophique des qualités des Imâms (as)
•    Identité de la station de l’Imâmat et des qualités de l’Imâm :
Comme nous l’avons dit précédemment, l’Imâm (a) occupe, dans l’axe de la remontée (qows-e su'ûd), la station la plus élevée et les qualités de l’Imâmat procèdent de ce degré supérieur de l’être.
Etant donné que les perfections de l’être ont une existence extérieure et réelle, l’élection ou l’intronisation de la part des gens ne jouent aucun rôle dans leur réalisation. L’Imâm Rezâ (37) (as) a souligné ce point dans la tradition numéro 518, et c’est dans ce même hadith qu’il a décrit l’Imâmat comme étant bien plus élevé pour que l’Imâm soit élu ou désigné par les suffrages des hommes ordinaires. Le seul devoir des hommes est de connaître les awliyâ, c'est-à-dire ceux que Dieu a désignés pour être leurs chefs. (38)
Rûmî dit :
Dide -yi khâham ke bâshad Shah-shenâs
Tâ shenâsad Shâh râ, dar har lebâs

Je veux un regard qui discerne le Roi
Pour reconnaître le Roi dans toutes Ses apparences
Quelques remarques :
•    C’est Dieu qui désigne l’Imâm et le fait connaître, et non pas les hommes. Sur le parcours de la remontée de la procession de l’être, les stations supérieures peuvent connaître les stations inférieures, mais ces dernières n’ont pas la capacité inverse.
Comme le dit Rûmî :
Dar nayâbad hâl-e pokhteh hich khâm
Jamais le cru ne comprendra ce qu’est le cuit
L’inférieur ne connaît pas le supérieur ; non pas au sens de la connaissance purement mentale (conceptuelle) mais de la connaissance vraie, celle dont les gnostiques et même les philosophes ont dit qu’elle entraîne l’unification du connaissant et du connu, où le connaissant devient ce qu’il connaît.
Par conséquent, les êtres des stations inférieures peuvent savoir qu’il existe des stations supérieures, mais ils ne peuvent pas connaître pleinement les détenteurs de ces stations. C’est pourquoi ils sont incapables de savoir quel homme est le meilleur, le plus digne d’occuper la fonction d’Imâm, et encore moins de voter pour ou contre lui. Il s’agit de stations et de fonctions définies par Dieu Lui-même, comme de choisir quel homme devrait être envoyé à tel ou tel peuple. (39)
Si les hommes passent outre ce principe, ils seront induits en erreur ou risqueront d’élire quelqu’un qui serait dépourvu de toute qualité – cela alors que la position de l’Imâm ne peut convenir qu’à l’être méritant, c'est-à-dire à celui qui a atteint le degré de compétence et de perfection lui permettant de mener à bien sa mission.
N’oublions jamais que nous sommes dans le contexte de la révélation et que nous ne parlons pas d’un sujet laïc pouvant être traité indifféremment, selon le bon gré des électeurs. L’Imâm (as) a une fonction à l’égard de la prophétie. Il est le gardien du sens de la révélation. Il ne modifie pas la révélation, mais il en est l’interprète autorisé que Dieu a désigné aux hommes comme référent.
Personne ne peut accéder à cette station même par un effort spirituel, encore moins par une ruse politique. Il ne s’agit pas seulement d’une station spirituelle, ce qu’elle est à l’évidence aussi, mais d’une fonction religieuse que Dieu a instaurée comme complément à la Révélation pour préserver celle-ci.
Le croyant comprend que si Dieu a annoncé la fin du cycle de la prophétie avec le Prophète de l’islam, ce n’est pas pour abandonner les hommes à eux-mêmes, mais pour leur donner la bonne nouvelle de l’avènement de l’Imâmat, qui n’est pas une prophétie mais encore une fois une fonction religieuse de l’herméneutique, c'est-à-dire chargée de maintenir vivant le sens du Coran. Il ne s’agit pas seulement de protéger un livre matériel contre la corruption par les excès des hommes, mais surtout de protéger son sens en le gardant vivant.
Ceux qui nient totalement l’Imâmat s’imaginent que le prophète et les Imâms sont apparemment des humains comme tous les autres et ils ne voient pas de raison de croire en l’existence d’une réalité supérieure spécifique. Par conséquent, l’Imâm doit être désigné nommément par le Prophète lui-même, ou par l’Imâm précédent pour éviter toute contestation ou erreur.
2. La fonction d’Imâm est attribuée par Dieu et ne s’obtient pas par le mérite, aussi reconnu qu’il puisse être.
L’homme est un « monde total » (kawn-e jâme’) ; c'est-à-dire que tous les degrés de l’être lui sont potentiellement accessibles. Certains de ces degrés lui sont accordés sans qu’il les ait volontairement cherchés, comme lors de la traversée des étapes végétales et animales.
Mais l’accès aux autres étapes supérieures est tributaire de l’exercice, de l’effort, de la préparation et de l’édification volontaire. Car sans effort et sans peine, la « deuxième naissance » et le transfert des étapes du monde matériel aux stations du monde des esprits séparés qui en sont les corollaires, est impossible. Cela est donc impossible excepté pour les « aimés » (mahbûb) et les « ravis » (majzûb) de Dieu dont le cheminement initiatique ne se base pas sur l’ascèse et l’effort, mais résulte de la bienveillance de Dieu et de Sa saisie (jadhba).
Or, les prophètes et les saints font partie des bien-aimés de Dieu. L’Imâm Rezâ (as) a mis l’accent sur ce point. Et c’est en raison de cette « élection » ou de cette préférence divine dont ils jouissent que les hommes ignorants les ont jalousés. (40)
3. Sur la base de cette interprétation, l’explicitation de la fonction d’Imâm, ainsi que celle de la prophétie, il ressort que cette fonction n’est pas conditionnée par l’âge des personnes – il est arrivé au cours de l'histoire que des hommes vieillissants aient invoqué par mépris, le critère de l'âge pour écarter du pouvoir des jeunes plus qualifiés qu’eux pour la gestion des affaires – car l’éveil de l’Imâm et son éducation se font par un secours divin, une bienveillance et une saisie divines, et non par la voie de l’éducation ordinaire et de l’âge. L’Imâm Rezâ (as) a également commenté ce point. (41)
Nous pouvons d’ores et déjà confirmer la vérité de cet enseignement selon lequel « ne jamais contrevenir au Bien » en toute chose a un effet miraculeux.
L’hygiène de vie des Imâms, leur observance stricte des règles concernant la nourriture et leur moralité excellente qui n’est pas altérée même par les péchés mineurs, sont une indication de ce qui est à l’origine de la puissance de leur énergie spirituelle (hemmat).
Ils sont loin de l’erreur, ce sont donc des esprits qui ne connaissent pas l'inquiétude, la peur ou la fatigue qui use les organes physiques. Leur corps conserve plus longtemps sa vigueur et sa fraîcheur, comme l’enseignent d’ailleurs les médecines traditionnelles qui rattachent la santé du corps à celle de l’esprit.
Les hommes ordinaires qui se plient à ces règles sous la direction d’un maître parviennent aussi à des stations où ils sont les témoins du miracle de l’esprit en raison de son influence remarquable sur le corps et ne doutent par conséquent plus qu’il puisse y avoir des êtres humains infaillibles.
Il existe plusieurs traditions qui mettent en évidence l’idée que la capacité de l’esprit, du cœur et du corps des Imâms (as) est différente des mêmes organes chez les gens ordinaires (42) . De même leur conception dans le sein de leur mère n’est pas tout à fait ordinaire. (43)
Explication philosophique des qualités des Imâms (as) (suite)
B. L’Imâm est constamment l’objet du soutien divin et de l’inspiration du monde invisible :
Ce soutien et cette inspiration divine résultent de l’élévation du degré de l’être des Imâms. Car l’Imâm, à l’instar du prophète, bénéficie d’un degré de l’être spécial. Ce degré est immatériel et miraculeux par rapport aux degrés atteints par les autres humains. Pour cette raison et comme nous l'avons vu, les effets de ce degré sublime sont aussi miraculeux, et l’un d’entre eux consiste dans le fait que la science de l’Imâm est extraordinaire.
Nous allons maintenant relever quelques points importants en rapport avec ce qui précède. Ces points ont aussi été évoqués largement dans les hadiths et les traditions :
•    L’Imâmat est l’ésotérique de la prophétie, et les deux ont en partage de boire à la même source. Comme l’Imâm Rezâ (as) l'a souligné, la seule différence entre un prophète et un Imâm consiste dans le fait que le prophète voit l’ange (de la révélation) et entend sa parole, alors que l’Imâm entend l’ange mais ne le voit pas. (44)
•    Etant donné que du point de vue des perfections existentielles, l’Imâm ne jouit pas de la position de prophète et que l’Imâmat est dans la jonction étroite et ininterrompue avec la prophétie, l’Imâm est donc l’héritier légitime des sciences et des Livres révélés aux prophètes. L’Imâm Rezâ (as) a décrit les Imâms comme les élus de Dieu et les héritiers du Livre de Dieu (le Coran). (45) L’Imâm connaît tous les Livres célestes dans quelque langue qu’ils soient écrits ou révélés, (46) comme l’a déclaré l’Imâm Mûsa ibn Jaafar (as). (47)
•    Nous disposons de nombreuses attestations de cet héritage à travers les différents hadiths et traditions tels que :
•    Les Imâms sont ceux que le Coran décrit comme « ceux qui détiennent une science bien assise» ou encore « ceux qui sont bien enracinés dans la science » (48) (Sourate Âl ‘Imrân (La famille de 'Imrân) ; 3 : 7) ; ils possèdent la capacité d’interprétation des versets du Coran. En outre, les fondations sur lesquelles reposent les nombreuses profondeurs de sens ésotérique (batn) du Coran correspondent aux mêmes différences de degré d’être parmi les humains. Chaque homme ou femme obtient une connaissance des réalités coraniques en proportion de son degré de perfection et de « séparation » (49) au sens philosophique (tajarrod). Ils sont les trésors de la science divine et les interprètes de la révélation (50) ; les Imâms Sâdeq (51) et Bâqer (as) (52)  ont dit : « Personne, hormis les Imâms, ne possède pleinement l’ensemble des sciences coraniques ». (53)
•    Les Imâms sont les Associés du Noble Prophète (s) (54) .
•    Les emblèmes et les preuves miraculeuses des anciens prophètes sont détenus par les Imâms. Comme les Tablettes de la Loi et le bâton de Moïse, le sceau de Salomon, la chemise de Joseph, les armes du Prophète de l’islam (s), ses lettres cachetées, le Feuillet (Sahîfa) et l’Englobante (Jâmi’a) et autres insignes de l’héritage et de la puissance des prophètes (as). (55)
•    L’affectation de l’Esprit Saint du service du Prophète au service de l’Imâm, comme l’a expliqué l’Imâm Sâdeq (as) : « L’Esprit qui descendait sur le Prophète de l’islam n’est pas retourné au ciel : il est resté avec les Imâms. » (56) . Rappelons aussi que l’Imâm 'Alî (as) a dit que cet Esprit (al-Rûh) n’était pas un ange parmi d’autres. (57)
•    Comme la science de l’Imâm est innée, à savoir une inspiration et une science provenant directement de Dieu (ladunni), elle possède les caractéristiques suivantes :
•    L’Imâm est l’homme le plus savant de son temps, parce que sa science est un effet de son être, et que son être est doté du plus haut degré d’être de son temps. (58)
•    La science des Imâms est une science ininterrompue, constante, qui s’enrichit et se renouvelle à chaque instant à la source infinie de l’inspiration divine. L’Imâm Musâ Ibn Jaafar (as) a dit : « La science de l’Imâm possède trois directions : le passé, le futur et le présent. » Il a ajouté que la troisième sorte de science, celle du présent, était la résultante de l’inspiration projetée sur le cœur de l’Imâm, la transmission au moyen de l’audition. Cette troisième sorte de science est la plus élevée qui soit. Mais il rappelle qu’aucun prophète, après le Noble Prophète de l’islam (s), ne viendra plus et qu’il ne faut pas considérer l’Imâm comme un prophète. (59)
•    Chaque fois que l’Imâm souhaite connaître une chose, Dieu la lui enseigne. (60)
•    Quand ils rencontrent des hommes sages et dignes de confiance, des hommes ayant accédé à un degré d’être proche du leur, les Imâms (as) les informent de toute chose. (61) Parce que le Pur ne se confie qu'au Pur.
•    La science des Imâms est la seule qui soit exempte d’erreur et de contradiction.
C- L’Imâm est l’observateur de tous les évènements du monde et de tous les comportements humains.
D’après la doctrine (62) de l’unité de l’être (wahdat al-wujûd) et de sa réalité modulée selon différents degrés, comme on l’a vu, l’Imâm jouit du plus haut degré d’intensité de l’être. Pour cette raison, il se trouve au sommet de la hiérarchie ontologique. Il en résulte :
•    Une souveraineté universelle de l’Imâm sur le monde des possibles.
•    Une maîtrise et un contrôle du cours des évènements, et principalement des comportements humains face à ces évènements. Ceci est conforme à ce que disent les traditions, à savoir que toutes les actions des hommes sont présentées au Prophète (s) et aux Imâms (as).

Explication et élucidation philosophique des qualités des Imâms (as)
D. L’Imâm est impeccable et possède le plus haut degré de la vertu et de la foi :
Les Imâms bénéficient largement de leur degré d’être extrêmement intense, et en particulier, ils sont préservés de l’erreur et du péché. Car l’erreur et le péché sont causés par l’ignorance et l’imperfection, or l’Imâm est tenu à l’écart de toute confusion et de tout péché. Comment un homme qui n’est pas un ignorant et ne souffre d’aucun défaut et d’aucune faiblesse, pourrait-il tomber dans l’erreur et le doute ? D’autre part, le facteur le plus important de l’aberration chez l’homme réside dans la passion, la colère, la luxure ; or nous avons vu que les degrés supérieurs ne sont pas sous l’emprise des degrés inférieurs et échappent totalement à leur influence. Il s’ensuit que l’Imâm qui est au sommet de la pyramide de l’être ne sera jamais tenté d’accorder le moindre intérêt à la renommée, aux biens, aux richesses et aux ornements de ce monde. C’est exactement pour cette raison que le Noble Prophète de l’islam (s) ne prêtait aucune attention au monde. Parce que ces hommes saints sont à la recherche d’un Bien-aimé que ni la terre ni le ciel ne peuvent contenir. En comparaison avec la Présence divine, ce monde-ci et le monde de l’Au-delà n’ont même pas la valeur d’un grain d’orge.
De ce qui précède, nous tirons les conclusions suivantes :
•    L’Imâm est préservé de l’erreur et du péché. (63)
•    La direction préservée des errements et de la déviation est un privilège exclusif de l’Imâm. En présence d’un Imâm, suivre un autre homme non préservé de l’erreur et lui obéir est contraire non seulement à la Loi mais aussi au bon sens. C’est la raison pour laquelle l’Imâm Rezâ (as) a affirmé que les Imâms étaient les étoiles et les signes de la bonne guidance, (64) conformément au verset coranique (65)  : « Et des repères, tels qu’ils se guident au moyen des étoiles », (Sourate Al-Nahl (Les abeilles) ; 16 : 16). Le Prophète (s) a dit : « Mes compagnons sont comme des étoiles », quelqu’un lui posa la question : « Qui sont tes compagnons ô Envoyé de Dieu ? » Il répondit : Ce sont les Douze Imâms après moi, lequel d’entre eux que vous suivrez, vous serez guidés… » (66) . Seuls les Imâms sont la source de vérité, les autres prétendants non qualifiés pour cette fonction sont source de vanité. (67) Les Gens du Rappel (ahl al-Zikr) sont les plus aptes à répondre aux questions de ceux qui ne savent pas. (68) Les khalifes divins sont la porte de la connaissance de Dieu. (69)
•    L’obéissance au guide impeccable est obligatoire du point de vue de la raison et de la Loi, comme l’ont confirmé l’Imâm Mûsâ ibn Ja'far et l’Imâm Rezâ (as) (70) , et la nécessité de se soumettre à l’évidence. (71)
•    Avec la possibilité qu’il existe un guide infaillible, la raison et la Loi divine commandent de chercher à le connaître, en tant que devoir religieux. (72)
•    A défaut de connaître l’Imâm et de se soumettre à lui, les actions de l’homme seront sans valeur et ne seront pas agréées, suite au vice que constitue la négligence d’un principe de base. (73)
•    La fermeté et la droiture dans l’alliance aux Imâms (velâyat) est un devoir et une nécessité. Jamais les hommes ne pourront se dispenser de l’Imâm. (74)
E. L’Imâm en tant que source de charismes et de miracles :
Dans notre exposé au sujet des qualités des Imâms, l’acquisition de l’efficience divine, à savoir la manifestation de la puissance de faire venir à l’être (75) des essences anéanties, la puissance de néantisation des essences existantes, ainsi que la libre gouvernance (tasarrof) du monde de l’être et de la matière de l’univers, ne concerne pas les degrés inférieurs de l’être comme les choses inertes, les végétaux et les animaux, mais est réservée aux êtres qui sont au-dessus de la matière, à savoir les êtres séparés, immatériels. L’homme aussi, en tant que « résumé de l’univers », quand il parvient, dans son ascension, au degré de l'immatérialité (tajarrod), est en réalité parvenu à la station créatrice du « Sois ! » (Kon). Il acquiert la capacité et la condition requise pour pouvoir agir au nom de Dieu.
Comme l’Imâm se trouve dans la station la plus élevée de l’être, il est normal que la capacité créatrice partielle soit aussi de son attribution. Et comme sa science se trouve au niveau du miracle, sa puissance aussi se trouve au niveau du miracle. Et c’est cela la philosophie du miracle et des charismes, par la science et par les actes, dans le monde sensible et le monde suprasensible, de l’Imâm.
Il en découle :
1. En tant qu’un homme parfait, l’Imâm est investi de la fonction de représentant de Dieu sur terre, il est aussi l’épiphanie du Nom total Allah, qui rassemble tous les noms et qualités de beauté et de majesté de Dieu. Les hadiths et autres traditions évoquent cette réalité en disant que les Imâms ont le plus grand bénéfice du « Nom Suprême » (Ism a‘zam), ou que les Imâms portent les insignes et les armes des prophètes, symboles de la puissance et de la science divine.
2. La manifestation des divers miracles et charismes de la part de l’Imâm est parfaitement compatible et conforme à la raison et à la logique. Ainsi, sur ordre du septième Imâm, Mûsâ ibn Ja'far (as) un arbre s’est mis en mouvement. Une canne dans la main de l’Imâm Muhammad Taqî (as) a prononcé des paroles. De même, on a rapporté que l’Imâm Rezâ (as) avait accompli des miracles, comme celui de la main blanche (miracle de Moïse), la guérison de malades, ainsi que l’exercice de pouvoirs surnaturels sur la matière, des réponses à des questions réputées insolubles ou la révélation d’informations concernant l’invisible.
A ce propos et pour compléter les informations du lecteur, nous allons évoquer trois points en relation avec le sujet :
Premier point : le lien reliant la science à la puissance
Comme cela a été expliqué dans l’analyse philosophique des qualités des Imâms, la science et la puissance extraordinaires procèdent toutes les deux d’une seule source qui est justement la supériorité du degré de l’étant.
Mais ce qui est remarquable et ce sur quoi ont insisté les hadiths et les traditions, c’est le fait que la science possède une antériorité ontologique sur la puissance. Ce qui signifie que la science et la conscience sont la base de la puissance et de la capacité. Le Coran dit que « Dieu embrasse toute chose de par Sa science » (76) . La science passe ainsi avant toute autre qualité excepté la bonté divine (Rahma) qui est aussi décrite comme embrassant (77) toute chose sans exception. Dans le Coran, il est ordonné au Prophète (s) de prier ainsi : « Ô mon Seigneur, accrois mes connaissances ! » (78) . Il ne demande pas un surcroît de puissance ou de richesse, mais de science, parce que la science est en réalité ce qui rapproche de l’être, selon le principe que l’on devient ce que l’on connaît. Dans les traditions de l’Imâm Mûsa ibn Ja'far (as), il est fait cas de ce que le Prophète de l’islam (s) était plus savant que les prophètes antérieurs à lui et que les Imâms étaient les héritiers de sciences qui leur ont conféré un pouvoir d’accomplir des actes dont les prophètes antérieurs ne disposaient pas. Il a ajouté : « Nous avons hérité d’un livre qui contient l’énoncé et l’explication claire de toute chose, et qui nous donne puissance sur toute chose, comme en fait allusion aussi le Coran Glorieux ». En effet, il est fait mention dans le Livre Saint, de « quelqu'un qui avait une connaissance du Livre » et qui par ce moyen a accompli le prodige de transférer en moins d’un clin d’œil le trône de la Reine de Saba, de son palais à celui de Salomon. (79)
A notre point de vue, et en s’appuyant sur les principes de la philosophie islamique, ce point subtil peut être analysé et expliqué de la sorte : comme cela a été établi dans la discussion au sujet des qualités de Dieu, exalté soit-Il, la science divine est une science active et non réactive, dans ce sens qu’au contraire de notre science qui se fonde sur l’observation des choses du monde, la science divine n’est pas un reflet ou une représentation des choses du monde. Sa science est le principe et l’origine des phénomènes du monde. La science divine possède une antériorité logique et ontologique sur le monde. C’est par rapport à la science divine que le monde se configure : ce n’est pas le monde qui est à l’origine de la science divine. Il serait d’ailleurs absurde de poser l’inverse : cela impliquerait que la connaissance de Dieu s’accroîtrait à chaque information fournie par un nouvel évènement dans le monde. Et cela serait contraire à la perfection divine qui nécessite la connaissance avant la chose, durant la chose et après la chose. Dieu n’a rien à apprendre : Il connaît tout.
Le monde reflète la science divine. Sa transformation continue reflète la science infinie de Dieu. Dieu agit par bonté. (80)
Par conséquent, compte tenu du degré d’être, l’Imâm est dans sa vie terrestre, l’être le plus proche de Dieu, comparé aux autres êtres qui lui sont contemporains. C’est pourquoi son existence et ses effets sont dotés d’une dimension divine, et c'est pourquoi aussi sa science « ressemble » à la science divine, c'est-à-dire qu’elle est active.
Cela en vertu d’une tradition divine selon laquelle : « Allah, a dit: « Celui qui montre de l'hostilité à l'un de Mes bien-aimés, Je lui déclarerai la guerre. Mon serviteur ne se rapproche pas de Moi par une chose que J'aime, comme Il le fait avec ce que Je lui ai prescrit. Et Mon serviteur se rapprochera de Moi par les actes surérogatoires, jusqu’à ce que Je l'aime ; et, lorsque Je l'aimerai, Je serais son ouïe avec laquelle il entendra, sa vue avec laquelle il verra, sa main avec laquelle il saisira et son pied avec lequel il marchera. » (81)
L’imitation de Dieu, c'est-à-dire le fait de se conformer aux ordres de Dieu, nous rapproche de Lui, et nous fait obtenir des qualités divines, que l’on appelle takhalluq billâh, c'est-à-dire l’acquisition des caractères divins. A plus forte raison, chez l’Imâm dont l’être est le plus proche qui soit de l’être divin. La science de l’Imâm devient active, à l’image de celle de Dieu, et de même sa puissance et sa volonté. C’est cela le fondement de la correspondance étroite qui existe entre la puissance et la science du Livre, selon les traditions et les hadiths.
Deuxième point : la science et les pouvoirs miraculeux des Imâms ainsi que leur état de victime (des tourments, injustices, haines et jalousies) des hommes.
Il reste à se demander pourquoi les Imâms pourvus d’autant de science et de pouvoirs surhumains, connaissant même le moment exact où surviendra leur mort, pourquoi donc commettent-ils parfois des actes qui les conduisent à l’échec et parfois même à la mort ?
En réponse à cette question, il faut rappeler ce que nous avons dit, à savoir que la science de l’Imâm est la science la plus parfaite après celle de Dieu, et que la science de Dieu est le fondement du décret et du destin des hommes. Il s’ensuit que la science des Imâms est une science du décret divin et de la destinée, et toute leur vie est un mouvement en direction de ce décret et de ce destin et est conforme à eux. Cela afin que la responsabilité légale (des hommes envers les Imâms et des Imâms envers les hommes) soit accomplie, que les hommes soient éprouvés dans leur foi et exposés à la tentation. Autrement, l’Imâm pourrait renverser tout pouvoir injuste, de quelque nature qu’il soit, et l’anéantir (82) .
Troisième point : Exception dans la science et la puissance de l’Imâm
Il arrive de rencontrer dans la littérature religieuse des hadiths ou des informations faisant état de cas où l’Imâm n’était pas au courant d’une chose ou l’ignorait, qu’il n’avait pas puissance sur une chose, qu’il dise lui-même qu’il ne savait pas ou ne pouvait pas, comme dans la tradition numéro 659. Ces cas trouvent leur explication sur la base des principes suivants :
•     Le mouvement et le cours des évènements vont dans le sens de la réalisation du décret et de la prédestination.
•     Il arrive aussi que les Imâms (as) veuillent se montrer sous leur jour d’êtres humains et de se conformer à l’existence ordinaire de tout le monde, comme l’explication que donne Qaysarî (83) sur cette base, pour les cas où les prières du Noble Prophète (s) et des Imâms (as) n’ont pas été exaucées.
•    Respect de la règle de l’arcane (taqiyya (84) ) qui se fonde sur le respect des niveaux d’intelligence des interlocuteurs et de l’auditoire.
Explication et élucidation philosophique des qualités des Imâms (as)
F. L’Imâm est unique en son temps, le seul de son vivant
Puisque l’Imâm est au sommet de la hiérarchie du monde de l’être, qu’il est investi de l’intensité la plus forte de l’être de son temps terrestre et qu’il est le premier chaînon sans intermédiaire de l’effusion sacrosainte de Dieu, il jouit naturellement de toutes les perfections qui sont inhérentes à ce rang. Entre autres qualités parfaites, celle de l’unicité, qui signifie que l’Imâm de chaque époque est unique, il n’y a que lui et il est impossible qu’il y en ait deux en fonction en même temps.
Il en résulte :
•    Pour chaque époque ou cycle, il n’y aura jamais plus d’un Imâm. Les traditions remontant à l’Imâm Rezâ (as) confirment ce point. (85)
•    Chaque nouvel Imâm est investi des qualités et perfections de la science, dans les derniers instants de la vie de son Imâm prédécesseur. (86)
•    Comme l’a mis en évidence l’Imâm Rezâ (as), un Imâm se doit de désigner l’Imâm qui lui succèdera et de le faire connaître, afin que le transfert du dépôt sacré soit effectué. (87)
•    Chaque Imâm est informé miraculeusement de la mort de l’Imâm précédent, même quand il ne vit pas (ou ne se trouve pas) aux côtés de son prédécesseur. De même, en éprouvant un sentiment et un état nouveau de son être (88) , il ressent par inspiration divine que c’est lui qui est élu pour porter cette charge de l’Imâmat.
G. L’existence ne sera jamais dépourvue d’Imâm
Le sujet portant sur le fait que la terre ne sera jamais dépourvue de la présence d’un « Hojjat », d’une Preuve de Dieu (89) , – que la présence de la Preuve divine est nécessaire et que l’existence ne peut se poursuivre sans elle –, repose sur l’idée que l’existence de l’Imâm est une nécessité de l’effusion divine dans le monde de l’être, ce qui implique que tant que le monde de l’être subsistera, l’existence de l’Imâm sera nécessaire et indispensable.
D’autre part, en raison du besoin des hommes d’une guidance céleste, l’Imâm est le flambeau éclairant de la guidance, le garant et le protecteur de la révélation divine, ainsi que la référence légale de l’herméneutique coranique, c'est-à-dire qu’il est l’autorité la plus compétente pour faire l’exégèse du texte coranique. Et de ce point de vue, tant qu’il y aura des hommes, il y aura un Imâm. C’est pour cela que dans les traditions chiites, il est dit que le dernier homme à mourir sera l’Imâm, et que s’il ne restait plus que deux hommes sur la terre, l’un deux serait l’Imâm. L’Imâm Rezâ (as) a dit : « Sans la présence de la Preuve de Dieu, la terre s’écroulerait », parce que le monde de l’existence, privé du soutien de l’Effusion continue et du secours divin, ne connaîtrait pas d’autre destinée que le néant.
Outre cela, la nécessité de la présence de l’Imâm peut aussi se démontrer par les arguments suivants :
•    La réalité de la révélation divine est un ensemble de significations générales et vastes que les esprits ordinaires n’ont pas la capacité de comprendre. Comme le Coran est un Livre qui existera toujours et que l’interlocuteur réel de Dieu est le Noble Prophète (s) qui sert de Cœur et d’Esprit, de lieu d’inhésion et de réception de la révélation ; après lui, seuls les Imâms sont à même d’hériter la fonction de référents et d’interprètes du Coran. (90) Comme cela a d’ailleurs été confirmé par une tradition de l’Imâm Sâdeq (91) (as).
•    L’effusion et l’inspiration divines sont continues. Il est donc nécessaire qu’à chaque époque, il existe un être ayant qualité pour recevoir cette effusion et cette inspiration et qui soit digne que l’Esprit et les anges s’adressent à lui. Rappelons que les Imâms se sont appuyés sur la continuité de la Nuit du Destin (92) (laylat al-qadr) après le Noble Prophète (s) pour justifier et démontrer la continuité et la permanence de la fonction de l’Imâmat. (93)
•    Avec l’Imâm, Dieu établit Sa Preuve (Hojjat) devant la création. Comme l’Imâm Mûsâ Ibn Ja'far et l’Imâm Rezâ (as) l’ont affirmé. (94)
•    Les Imâms sont les témoins de Dieu à charge et à décharge vis-à-vis des créatures en tant que modèles et exemples ; et aussi pour la surveillance et l’examen des actes et témoignages au jour de la Résurrection (95) .
H. Obéir à l’Imâm : source de bonheur ; s’opposer à lui : source d’infortune
Avec les qualités que nous avons exposées et qui sont requises de l’Imâm, il est évident que se rallier à l’Imâm, lui obéir, reconnaître son rang et témoigner de sa légitimité ne peut que garantir le bonheur dans ce monde et dans l’autre. Par contre, s’opposer à lui, lui désobéir ne peut être que source de malheur et d’égarement. Les Imâms sont les piliers du monde de l’être, et les seuls moyens pour assurer le salut de l’humanité. (96) Pour cette raison, ceux qui prétendent faussement à l’Imâmat, au califat divin et qui nient cette dignité divine accordée à la Famille du Prophète (s), ou qui soutiennent ces dénégateurs de la vérité divine, sont tous voués au châtiment divin. (97)
Selon une tradition du Prophète (s) : « Mourir sans avoir connu l’Imâm, c’est mourir dans l’ignorance (jâhiliya) et la perdition ». (98)
•    Connaître l’Imâm et se rallier à lui nécessitent une aptitude et une capacité spéciales
Les traditions rapportent que : « La parole de la Famille de Mohammad, (Salla Allah ‘alayhi wa âlihi wa sallam)(99) est une parole difficile et rare que seul un prophète envoyé, un ange rapproché ou un croyant dont le cœur a été éprouvé, peuvent croire pleinement et supporter. » (100)
Cela s’explique par le principe que la connaissance de la station de l’Imâm requiert impérieusement un degré d’être élevé et parfait, ou proche de la perfection, correspondant à cette noble station. Il n’est donc pas donné à tout le monde de se mettre à l’ombre du seuil de ces Êtres Beaux et Lumineux. La capacité limitée des hommes ordinaires ne leur permet pas d’embrasser du regard ce soleil flamboyant, et cette mer sans rivage de l’Imâmat.
C’est pourquoi nos Imâms impeccables (as) font remonter le lien de la reconnaissance de la walâya (101) , tout comme la reconnaissance de l’unité divine, au moment initial où les êtres étaient des poussières dans les mains de Dieu : dans Sa Main droite, les partisans des Imâms, et dans la gauche, leurs ennemis. De même, ils considèrent les chiites et les partisans de la walâya (alliance et vassalité avec les Imâms) comme faisant partie intégrante de l’Imâmat, c'est-à-dire qu’ils ont été créés de la même origine et de la même matière qu’eux. Ce qui est pur l’est depuis les origines. Pour connaître les Imâms, il faut une pureté intérieure, une capacité en rapport et une aptitude spéciale, car ces Purs sont l’âme du monde ; l’âme de l’âme. Même si en apparence, ce sont des hommes comme les autres hommes.

Notes :
1- Tchâhârdah Ma'sum (en persan : چهارده معصوم). L'expression désigne, dans le chiisme duodécimain, la famille du Prophète composée de sa fille Fatima, de son gendre 'Alî, de ses deux petits-enfants Hassan et Hossein ainsi que des neufs autres Imâms descendants de Hossein. Ensemble, ils forment les 14 Purs, les Infaillibles sur les qualités desquels Dieu se porte Garant.
2- Sadr al-Dîn Muhammad al-Shîrâzî, (1571 / 1640) plus connu sous le surnom de Mollâ Sadrâ, philosophe iranien de l’époque safavide. Doit sa renommée à son monumental ouvrage de philosophie « Les Quatre Voyages », (al-asfâr al-arba’a), nourri par la pensée d’Ibn 'Arabî, la critique d’Avicenne et la méditation des saintes paroles des Imâms de la Famille prophétique (as).
3- Qoddesa sirruh (en arabe : قدس سره) [sirr = secret ; qods = moqaddas = saint, sacré, sanctifié]. Formule d'eulogie réservée généralement aux hommes spirituels et aux grands initiés musulmans. Le ''secret'' fait référence au savoir ésotérique acquis du fait de leur proximité à Dieu.
4- Kitâb al-asfâr al-arba’a (Le livre des quatre voyages) est le principal ouvrage de Mollâ Sadrâ. Son titre complet est : Al-Hikma al-muta’âliya fi-l-asfâr al-‘aqliya al-arba’a (La théosophie transcendantale concernant les quatre voyages de l’intellect).
5- Médecin et philosophe juif de Bagdad, mort en 1284.
6- Kitâb al-Hujja (Le Livre de la Preuve) constitue l’un des chapitres essentiels du grand recueil de traditions chiites compilées par al-Kulayni sous le titre Al-Usûl min al-Kâfî. Mollâ Sadrâ a commencé le commentaire de ce recueil, mais il mourut sans avoir pu le mener à son terme.
7- Abû Ja’far Muhammad ibn Ya’qûb Ibn Ishâq al-Kulayni (864-941) est l’un des principaux traditionnistes du chiisme duodécimain. Il est l’auteur du Al-Osûl min al-Kâfî, première source de hadiths de l’Envoyé de Dieu (s) et des Imâms de la Famille du Prophète (s).
8- La théosophie illuminative ou orientale, hikmat al-ishrâq, est une philosophie projetée par Ibn Sina (Avicenne) dans son Kitâb al-Ishârât w-al-tanbîhât (Livre des directives et des remarques). Mais c’est surtout au philosophe Shihâb al-Dîn Yahyâ al-Suhrawardi d’Alep, du VIIème siècle de l’Hégire / XIIème siècle, qu’on doit d’avoir formulé cette philosophie de façon plus pertinente et systématique dans un ouvrage intitulé Hikmat al-Ishrâq. A ce sujet, pour les lecteurs intéressés, la meilleure référence dans la langue française est l'œuvre de Henry Corbin, grand philosophe et orientaliste français qui a contribué à faire connaître ce philosophe en Occident.
9- La vallée sacrée et le désert où Allah S’est adressé à Moïse.
10- Le mot Imâm est employé ici dans son sens le plus fort de chef spirituel de la religion. Il s’agit d’une position accordée par Dieu, comme faveur et grâce, afin que les hommes soient guidés, après la fin du cycle prophétique clos par le Prophète de l’islam (s). Il désigne donc des hommes hautement inspirés et infaillibles pour leur permettre d’accomplir pleinement leur fonction. Employé de façon générale, le mot Imâm peut désigner toute personne dirigeant la prière collective en privé ou dans une mosquée ou en tout autre lieu. Il peut aussi s’appliquer à un chef de quelque faction que ce soit.
11- (en persan : Emâm Rezâ امام رضا ). Huitième Imâm du chiisme. Son tombeau se trouve à Mashhad, dans le Khorâssân, en Iran.
12- Plus on descend dans l’ordre de la procession, plus règneront la matière, l’obscurité et l’ignorance.
13-  (en persan : harekat-e jowharî :حرکت جوهری) , (en arabe : haraka jawhariyya)
14-  Plus on s’élève, plus intense et perceptible sera la présence spirituelle.
15-  (Sharh-e Diwân-e Maybodî, édition lithographiée, en marge du Sharh Nahj al-Balâghah par Mohammad Lâhijî, page 217)
16- Verset coranique
17- Idem
18- Mathnawî, « Be Tas’hih-e Nicholson », vol. 3, vers 3901 à 3907.
19- C'est ainsi que Henry Corbin traduit l'expression arabe « asâlat al-wujûd ».
20- Nihâyat al-Hikma, première étape, section 3. Auteur : Tabâtabâ'î, Muhammad Hussein ; ouvrage en trois volumes.
21- Gloses du grand savant Seyed Haydar Amolî, (né en 1311, mort en 1385 de l'ère chrétienne), commentateur du Fusûs, en marge du Sharh-e manzûmeh de Mollâ Hâdî Sabzevârî, vol. 2, p. 294.
22- La catégorie de matière la plus vile.
23-  Asfâr, Vol. 7, p. 179
24- Ibid.
25- Ce poème figure dans les Tarâyeq al-Haqâyeq, volume 2, p. 179. C’est un ouvrage de spiritualité parsemé de citations de beaux poèmes en persan et de mots de maîtres en persan et en arabe, de l’auteur iranien du XIXe siècle, Ma’sûm 'Alî-Shâh. Ce dernier ne cite pas toujours ses sources et ne mentionne pas toujours l’auteur des poèmes.
26- (en persan : Fass-e Es’haaqi : فص اسحاقی) le mot fass, au pluriel fusûs, signifie en arabe un chaton, c'est à dire la partie d'une bague où s'enchâsse une pierre précieuse.
27- Gilis, Charles-André, Le Livre des Chatons des Sagesses (Traduction française du Fusûs al-Hikam d’Ibn Arabi) en deux tomes, al-Bouraq, Beyrouth et Paris, 1997. Le passage cité figure dans le tome premier, p. 193.
28- Ce titre désigne, rappelons-le, Sohrawardî d’Alep. Shahâb al-Dîn Yahyâ al-Sohrawardî (en persan : شهاب الدين يحيى سهروردى), grand philosophe de tendance gnostique, est né en 1155 à Sohraward en Iran. Il a été condamné à mort par quelques juristes qui le firent assassiner le 29 juillet 1191 à Alep, en Syrie. Voici d’où vient son surnom : al-Shaykh al-Maqtûl, c'est-à-dire « le Maître assassiné ».
29- Hikmat al-Ishrâq, Œuvres Complètes, Vol. 2, p. 242. Ce livre est traduit en français par Le Livre de la sagesse orientale.
30- Il s’agit de l’impératif divin qui fait sortir les choses du non-être à l’être. Les essences immuables ne sont connues que de Dieu, et Dieu les fait venir à l’être par l’ordre « sois » : (kon) ! Pour Ibn 'Arabî, cet ordre appartient à Dieu exclusivement. Les hommes pourront créer avec la permission divine par la formule « Bismillâh ! », au Nom de Dieu.
31- (En persan : شفا). Kitâb al-Shifâ, (Partie traitant de la Physique, art numéro 6, proposition 4, section 4). « Le livre de la guérison », ouvrage philosophique d’Avicenne. Il contient une partie dédiée à la "physique" et une partie à la "métaphysique" (elâhiyât), l’ensemble précédé d’un exposé de la logique (mantiq).
32- Al-Munqadh min al-Zalâl, édition du Caire, pp. 58-60. Ce livre est traduit en français par « Erreur et délivrance », par Farid Jabr, Beyrouth, 1959.
33- (En persan : ابوالحسن بهمنیار بن مرزبان (. Il s’agit du disciple d’Avicenne, Abu al-Hassan Bahmanyâr ibn Marzbân, savant iranien, zoroastrien d’Azerbaïdjan, mort en 1067.
34- (En persan : ملا هادی سبزواری) (1797-1873). Henry Corbin a contribué à faire connaître hors des frontières de l’Iran ce philosophe, théologien et poète iranien. Ses œuvres philosophiques sont des manuels dans les universités religieuses d’Iran.
35- (Hikmat al-Ishrâq, Idem, .p. 217). Cela ne signifie pas que Sohravardî admet la thèse de la transmigration des âmes : il met surtout en exergue le fait que d’autres sagesses antérieures avaient entrevu que l’existence humaine est la forme de vie la plus évoluée et la plus achevée de l’être manifesté.
36- Le Livre du Dedans (Fihi mâ fihi), œuvre en prose de Jalâl al-Dîn Rûmî, traduit du persan par Eva de Vitray Meyerovitch, Editions Sindbad, Bibliothèque Persane, Paris, 1976.
37-1 Il s’agit de l’Imâm 'Alî Ibn Mûsa surnommé al-Ridhâ, avec la lettre arabe Dâd que beaucoup d’orientaux, pas seulement iraniens, prononcent Rezâ. Nous avons conservé cette graphie pour la même raison. Le sanctuaire de l’Imâm Rezâ, le huitième Imâm des chiites, dans le Khorâssân iranien est l'un des hauts lieux de pèlerinage du monde.
38-Al-Usûl min al-Kâfî, précédent, traditions numéros 1181 à 1183.
39- (Idem, voir hadith 518).
40-Idem, traditions numéros 518 et 521.
41- (Idem, 991)
42- (Idem, 105 à 108)
43-(Idem, 996 – 1004)
44- Idem, de l’Imâm Rezâ (as) 705 ; de l’Imâm Bâqer (as) 699 ; et de l’Imâm Sâdeq (as) 697 et 700. Voir aussi les traditions 1020 à 1024, 1031 à 1035, et au sujet de ce que les sciences des Imâms font partie des mystères divins, Abû al-Hasan (as), 650.
45-Idem, de l’Imâm Rezâ (as) 559 ; et à ce sujet, les traditions des autres Imâms, 552 à 556 et 589 à 592.
46- Idem, 600 ; et aussi de l’Imâm al-Sâdiq (as), traditions 601, et 653 à 655
47-Mûsa fils de Jaafar (as) est le septième Imâm des chiites duodécimains. Il est le père de l’Imâm Rezâ.
48-L’expression coranique désignant « ceux qui sont bien enracinés dans la science » est la suivante : (râsikhûn fi al-‘ilm)
49-Idem, Imâm Sâdiq (as), 449 à 451. Au sujet du rapport existant entre les profondeurs de sens du Coran et les degrés de l’être, voir Asfâr, volume 7, page 36 et suivantes.
50- Idem, 500 à 505
51- Ja’far al-Sâdiq (as) est le sixième Imâm des chiites. Il est connu pour celui qui a définitivement assis le chiisme, au point que l'école duodécimaine est parfois appelée école ja'farite (al-mazhab al-ja'farî)
52- L'Imâm Muhammad al-Bâqir (as), mort en 733, est le cinquième Imâm du chiisme. Son surnom al-Bâqir fait référence à sa science religieuse immense.
53- Idem, 402 à 407
54- Idem, 678 à 680
55- Idem, les Imâms Bâqir et Sâdiq (as), 611 à 636
56- Idem, 709 à 715
57- Idem, tradition numéro 716
58- Idem, 672 à 677 ; les Imâms sont la source des sciences : 1036 et 1037
59- Idem, 681.
60- Idem, Imâm Sâdeq (as), 661 à 663, et 672 à 675.
61- Idem, les Imâms Bâqir et Sâdiq (as), 684 et 685.
62- Doctrine la plus conforme à l’enseignement philosophique de l’islam, dont les prémisses ont été posées par Ibn 'Arabî (mort en 1240) et son école, pour être exprimée de façon rationnelle dans le cadre d'un système philosophique précis par Mollâ Sadrâ Shîrâzî.
63- Idem, 518, et 716 à 719
64- Idem, 496 à 499
65- Wa ‘alâmât wa bi- al najmi hum yahtadûn...
66- Voir Ma’âni al-Akhbâr (Les sens des traditions), d’Ibn Bâbuyeh, surnommé Shaykh al-Sadûq, un des trois grands compilateurs de traditions chiites, p. 157.
67- Idem, 1038 à 1043
68- Idem, L’Imâm Reza (as) 545
69- Idem, 506 à 508. Voir aussi L’Imâm Reza (as), tradition numéro 1572
70- Idem, 481 et 483
71- 1009 à 1016
72- Idem, 1017 à 1019 et 1181 à 1183.
73- Idem, 460 à 468 et 965 et 966.
74- Idem, 580 et 581.
75- Il s’agit ici de thèmes évoqués dans le Coran, comme par exemple le pouvoir que Dieu a donné à Sayyidînâ ‘Isa ibn Maryam (as) (Jésus, fils de la Sainte Marie), de ressusciter les morts « avec la permission de Dieu », ou à Sayyidînâ Ibrâhîm (as), (Abraham) de redonner vie aux quatre oiseaux, ou encore au ministre du Roi Soleymân (as), (Salomon) de faire venir miraculeusement le trône de la Reine Belqîs (Belkis), de la lointaine Saba à la cour de Salomon. Il est question de pouvoirs accordés par Dieu à Ses Amis qui sont des serviteurs humains parfaits. Dans la littérature du soufisme, il existe aussi beaucoup de cas similaires.
76- Voir par exemple Sourate Al-An’âm (Les bestiaux) ; 6, verset 80 et Sourate TâHâ ; 20, verset 98.
77- Sourate Al-Ghâfir (Le pardonneur) ; 40, verset 7 et Sourate Al-A’râf ; 7, verset 156
78- Sourate TâHâ : 20, verset 114.
79- voir le Coran, la Sourate Al-Naml (Les fourmis) ; 27, verset 40
80- Voir Kitâb al-Shifâ d’Ibn Sînâ, Ilâhiyât : section 7 ; Kitâb al-Najât , Ilâhiyât, discours numéro 2, section 18 ; Kitâb al-Ishârât w-al-Tanbîhât, septième chapitre, namat 7, section 13 et 14 et 22 ; Al-Asfâr de Mollâ Sadrâ, nouvelle édition, vol. 6, pp. 176 et suivantes, et vol. 7, p. 57.
81- Hadith transmis par Boukhârî. Tradition figurant dans Al-Usûl min al-Kâfî de Kulaynî, au vol. 2, page 353, tradition numéro 8. Une tradition similaire a été recueillie par Boukhârî, compilateur sunnite de traditions selon ses propres critères.
82- Idem, l’Imâm Sâdiq (as), 675
83- Il s’agit de Sharaf al-Dîn Dâwûd Qaysarî (ou Kayserî), mort en 1350, le plus célèbre commentateur du Fusûs al-Hikam d’Ibn 'Arabî.
84- La « taqiyya » ne consiste en rien d’autre que dans le respect de la règle prophétique selon laquelle il faut parler aux gens selon leur capacité de compréhension. Ne rien dire qui soit de nature à soulever les passions des ignorants ou des faibles. La tradition prophétique recommande en revanche de ne jamais cacher la vérité à ceux qui sont dignes de la connaître.
85- Al-Usûl min al-Kâfî, tradition numéro 923.
86- Idem, Imâm Sâdiq (as), 717 à 719.
87- Traditions 723 et 724
88- Idem, l’Imâm 'Alî al-Naqî (as), 984.
89- Rappelons que l’expression Hujjat Allâh, « Preuve de Dieu », désigne d’abord les prophètes et les Imâms.
90- Ce qui n’empêche pas bien entendu que des savants puissent écrire des commentaires du Coran, comme cela a été fait et se poursuivra sûrement. Il est ici question de la capacité de l’Imâm de donner une interprétation mettant fin au débat des non qualifiés, C’est la raison pour laquelle il n’existe pas de commentaire canonique du Coran, que l’on pourrait imposer à l’ensemble des croyants. Le texte divin génère en permanence des sens nouveaux, et seuls les Imâms peuvent apporter des sens ayant force de Loi.
91- Idem, 498.
92- Voir la Sourate Al-Qadr (Le destin) ; 97, tous les versets.
93- Idem, 637 à 645.
94- Idem, successivement 438, puis 439 et 440.
95- Idem, 491 à 495.
96- Idem, 515 à 517.
97- Idem, l’Imâm Sâdiq (as), 693
98- Bihâr al-Anwâr (Les Océans des Lumières) de Allamâh Majlisî, vol. 23, p. 41.
99- « Que les prières et les Salutations de Dieu soient sur lui » : c'est la formule complète de la salutation rituelle prononcée après la mention du nom du Prophète. Pour chacun des Douze Imâms, la formule complète est « 'Alayhi- al-salâm » « Que la Paix soit sur lui ». Pour Fatimâ al-Zahrâ, la fille de l’Envoyé de Dieu, la formule est mise au féminin, on dit : « 'Alayhâ al-salâm ».
100- Al-Usûl min al-Kâfî, Idem, 1044 à 1048.
101- Dans la langue arabe, la forme wilâya se réfère à une autorité et le nom agent wâlî, qui en dérive, signifie gouverneur, protecteur ou préfet. La forme walâya se réfère à une proximité, d’amitié, de parenté. Dans ce cas, le nom agent est walî et sert à désigner le saint, awliyâ au pluriel. Le degré de walâya et la fonction de wilâya sont en fait reconnus à l’Imâm, car la relation d’alliance qui existe entre les Imâms (as) et leurs partisans est double : à la fois une allégeance spirituelle et une allégeance à une autorité temporelle. Cette allégeance affirme la reconnaissance de la fonction d’Imâm et proclame le désaveu (bara’ât) de ceux qui ne reconnaissent pas les droits des Imâms.

Références :
Qabasât (Les Braises), revue de recherche trimestrielle du cercle de la philosophie, de la religion et de la culture, troisième année, Nos. 10 et 11, pp. 134-147 ; Sadr al-Dîn Muhammad al-Shîrâzî, Al-Asfâr al-Arba’a (Les Quatre Voyages), (1571-1640) plus connu sous le surnom de Mollâ Sadrâ, philosophe iranien de l’époque safavide, nouvelle édition, 9 volumes ; Al-Kulaynî, Abû Ja’far Muhammad ibn Ya’qûb Ibn Ishâq (mort en 941), Al-Usûl min al-Kâfî, chapitre : Kitâb al-Hujja (Le Livre de la Preuve) ; Mohammad Lâhijî, Sharh-e Dîwân-e Maybodî, édition lithographiée, en marge du Sharh Nahj al-Balâghah, p. 217 ; Muhammad Hussein Tabâtabâ'î, Nihâyat al-Hikma (Le sommet de la sagesse), première étape, section 3, 1999. Ouvrage en trois volumes ; Molla Hâdî Sabzevârî, Ta’lîqât) (Gloses) pour le commentaire du Fusûs al-Hikam par Seyed Haydar Amolî, (mort en 1385), publié en marge du Sharh-e manzûmeh du même ; Ma’sûm 'Alî-Shâh, Tarâyeq-ol-Haqâyeq, volume 2 (en persan, de l’auteur iranien du XIXe siècle), Ce dernier ne cite pas toujours ses sources et ne mentionne pas toujours l’auteur des vers qu’il insère dans son œuvre ; Gilis, Charles-André, Le Livre des Chatons des Sagesses (Traduction française du Fusûs al-Hikam d’Ibn 'Arabî) en deux tomes, Al-Bouraq, Beyrouth et Paris, 1997. Le passage cité figure dans le tome premier, p. 193 ; Shihâb al-Dîn Yahyâ al-Sohravardî, Hikmat al-Ishrâq (La philosophie illuminative), in Œuvres Complètes, Vol. 2, p. 242. Ce livre est traduit en français par Le Livre de la sagesse orientale ; Ibn Sînâ, (Avicenne) Kitâb al-Shifâ (Le livre de la guérison), ouvrage philosophique d’Avicenne. Contient une partie Physique et une partie Métaphysique, (Elâhiyât), l’ensemble précédé d’un exposé de la Logique (mantiq) ; Ibn Sînâ (Avicenne), Kitâb al-Najât (Le livre du sauvetage) ; Ibn Sînâ (Avicenne), Kitâb al-Ishârât w-al-Tanbîhât (Le livre des directives et des remarques) ; Al-Ghazzâlî, Abu Hâmid, mort en 1111, Al-Munqadh mîn al-Zalâl, édition du Caire. Ce livre est traduit en français par « Erreur et délivrance », par Farid Jabre, Beyrouth, 1959 ; Jalâl al-Dîn Rûmî, Fîhi mâ fîhi (Le Livre du Dedans), œuvre en prose, traduit du persan par Eva de Vitray Meyerovitch, Editions Sindbad, Bibliothèque Persane, Paris, 1976 ; Mathnawî, « Be Tas’hîh-e Nicholson », vol. 3, vers 3901 à 3907 ; Ibn Bâbuyeh, Ma’ânî al-Akhbâr (Les sens des traditions). L’auteur surnommé Shaykh al-Sadûq, est un des trois grands compilateurs de traditions chiites ; Sharaf al-Dîn Dâwûd Qaysarî (ou Kayserî), auteur du plus célèbre commentaire du Fusûs al-Hikam d’Ibn 'Arabî.

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