Les salafistes se nourrissent des inégalités
L’anthropologue du fait religieux et auteur de "La République ou la burqa" Dounia Bouzar a fait état d’une « montée d'un sentiment de persécution du côté des non musulmans qui ont l'impression que l'islam impose ses normes et, en face, des musulmans qui ont l'impression qu'ils seront toujours stigmatisés".
Commentant les derniers incidents survenus dans la région française de Trappes près de Paris, Bouzar a indiqué que des mouvements radicaux ont émergé, notamment à Trappes, cette ville à forte population musulmane réputée pour abriter des réseaux ayant une conception de l'islam rigoureuse.
"Ces nouveaux mouvements religieux se nourrissent des inégalités et des frustrations, explique Mme Bouzar: quand des personnes ont le sentiment de ne pas avoir leur place dans la société, le discours salafiste retourne la situation en leur donnant un sentiment de toute puissance."
Jeudi dernier, des émeutiers ont protesté dans les rues deTrappes contre le placement en garde à vue d'un jeune homme interpellé lors du contrôle de sa femme qui portait le voile intégral.
Même si la majorité des musulmans n'est pas d'accord avec la lecture rigoriste de l'islam et ne soutient pas le port de la burqa, "ils font alliance car il y a eu beaucoup d'agressions contre les musulmans et que le gouvernement a mis du temps à réagir", selon Mme Bouzar.
D'après l'Observatoire de l'islamophobie, les actes antimusulmans (tags, dégradations de mosquées, attaques verbales ou physiques de femmes voilées) ont augmenté de 28% en 2012.
Depuis des mois, les responsables musulmans demandaient à l'Etat de dénoncer ces violences. Mercredi, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls semble les avoir entendus. Déclarant son "affection" pour les musulmans, il a dénoncé "une montée des violences" à leur égard, lors d'une visite à la Grande mosquée de Paris.
Pas sûr que cela suffise. Dans les banlieues "on a un contexte social (pauvreté, chômage), légal (la loi anti-burqa) et relationnel (avec les forces de l'ordre) explosif", juge Véronique Le Gloaziou, ajoutant: "Ces territoires sont des cocottes-minutes."
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