La sourate al-Fâtihat

آية البسملة
بِسْمِ اللهِ الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ  
Bi-smi-llâhi ar-Rahmâni ar-Rahîmi,
Par [la grâce du]  Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux, 

بِ..   « Bi »      
 
La préposition « bi » (par/avec), quel sens a-t-elle ?  Un sens d’accompagnement, de moyen, de causalité, de manière, de délégation ou de serment ? A quoi est-elle rattaché ?
 
اسْمِ    « Nom »      
 
Un « Nom » ? Le « Nom » de Dieu ? Pourquoi l’insertion de ce mot entre la préposition et « Dieu » ? Indique-t-il quelque chose de particulier ? Avons-nous un rapport spécifique avec le Nom ? Si oui, quel serait-il ?
 
اللهِ « Allâh »     
Allâh ! Ce mot avec ces lettres « a,l,l,h » a-t-il un sens particulier ? Nous avons traduit ce mot en français en mettant  « Dieu », le mot connu de tous les francophones. Pourquoi ? Pour éviter que l’on  perçoive, si l’on mettait « Allâh »,  le « Dieu des Musulmans » (comme si l’on parlait d’un autre dieu) et non pas « Dieu tel vu par les Musulmans ». Mais, il y a-t-il un sens particulier au mot même transcrit phonétiquement « Allâh » ?
  
Reprenons.. (en nous aidant de l’interprétation d’al-Basmalah que l’Imam Khomeiny(qs) avait présentée à la télévision iranienne après la victoire de la Révolution islamique et de Kashef al-ma‘nâ d’Ibn Arabî)
 
   بِ..   « Bi »   
Le « bi » ne peut pas avoir :
 
-une valeur causale parce que le sujet, en son fondement, n’est pas de l’ordre de la cause à effet. (Ici, nous parlons de Dieu et non de la création. Les lois de la causalité ne concerne que le monde de la création (al-khalq).) La meilleure locution que l’on peut trouver dans le Coran et qui pourrait exprimer l’ordre dans lequel on se trouve est la « manifestation » de Dieu ({tajallâ rabbuhu}(143/VII)) ou l’« apparition » de Dieu (zhuhûr) ({Huwa al-awwalu wa al-akhiru, azh-zhâhir wa al-bâtinu}(3/LVII)).
 
-ni une valeur d’accompagnement car ce serait faire de l’associationnisme (shirk) en plus que de faire preuve de mécréance.
 
-ni de délégation (« par délégation » de Dieu, c’est-à-dire « en lieu et place » ou de « la part » de Dieu) comme laisse entendre la traduction de « Au Nom de Dieu.. » Nous ne sommes pas habilités à parler en lieu et place de Dieu.
 
-Le « bi » aurait ici valeur de complément de moyen : « par » ou « grâce à » « je recherche l’aide de » ou « je commence en plaçant mon action sous le Bénédiction de Dieu par l’évocation de ces/Ses deux Noms ». D’où le choix d’avoir traduit par « Par [la grâce du] ».
 Ainsi, tout ce que nous faisons nous ne le faisons que par la « grâce de » Dieu. Il ne faut pas croire que nous soyons quelque chose d’indépendant de Dieu. Si nous étions coupés de Lui, ne serait-ce le temps d’un dixième de seconde, nous serions sortis de l’existence, nous n’existerions pas. Et il en est de même en ce qui concerne la permanence et le maintien de notre existence.اسْمِ    « Nom »     D’habitude le nom est une « marque » et sert à connaître, définir quelque chose. Chaque chose a un nom, une marque par lesquels elle est connue. Les Noms de Dieu Très-Elevé sont aussi des « marques » de Son Essence sacrée. Ils permettent à l’homme de connaître Son Essence sacrée à travers eux, même si de façon incomplète. Car l’Essence divine, personne ne peut L’atteindre, pas même le Sceau des Prophètes, le Prophète Mohammed(s).Dans un propos rapporté, l’Imam as-Sâdeq(p) (le 6ème Imam) met en garde un de ses disciples les plus doués, Hishâm fils d’al-Hakam, à propos des Noms de Dieu : «.. Le nom est autre chose que le nommé. Aussi celui qui a adoré le nom sans le sens (ma‘nâ) a fait acte d’incroyance et n’a rien adoré ; celui qui a adoré le nom et le sens (ma‘nâ) a fait acte d’incroyance et a adoré deux choses ; quant à celui qui a adoré le sens (ma‘nâ) sans le nom, voilà le monothéiste. (…) C’est que Dieu Tout-Puissant et Majestueux a quatre-vingt-dix-neuf noms : si le nom était le Nommé, chacun de ces noms serait une divinité. Mais Dieu est Un Sens (ma‘nâ) qui est indiqué par ces noms et tous sont autres que Lui. » (Usûl al-Kâfî, vol.1, bâb al-ma‘bûd N°2 (p87) – et bâb ma‘ânî-l-asmâ’i (p114)) Les Noms de Dieu indiquent Dieu sans être Lui. En même temps, ils sont des Manifestations de Son Essence. Le Nom de « Dieu » est la Manifestation de l’Essence de Dieu.  
Dans un autre propos rapporté de l’Imam as-Sâdeq(p), il est dit :  
 
« Celui qui a adoré Dieu par des conjectures, a fait acte d’incroyance ; celui qui a adoré le nom sans le sens (ma‘nâ), a fait acte d’incroyance ; celui qui a adoré le nom et le sens (ma‘nâ), a associé ; et celui qui a adoré le sens (ma‘nâ) en  « faisant tomber les Noms sur lui » par Ses Attributs par lesquels Il s’est Lui-même décrit, a alors lié son cœur à Lui et sa langue a parlé par Lui dans ses secrets et dans ce qui est connu. Ceux-là sont les croyants en vérité (ou les compagnons du Prince des croyants(p) en vérité selon un autre propos). (Usûl al-Kâfî, vol.1, bâb al-ma‘bûd N°1 (p87))
  
Que veut dire « faire tomber les Noms sur soi… » ?
 
Les Noms de Dieu ont des niveaux différents : il y a ceux de la Station (maqâm) de l’Essence, ceux de la Station des Manifestations par les Noms et ceux de la Manifestation des actes (comme le « Créateur »). Certains niveaux, nous pouvons les atteindre, d’autres sont réservés aux Proches-Elus de Dieu et du noble Prophète Mohammed(s).
 
Et la première chose à faire pour  « lier son cœur aux Noms de Dieu Très-Elevé » c’est d’abord prendre conscience au niveau du cœur du besoin d’eux de façon absolue dans le sens qu’ils indiquent l’Essence. Voilà pour le « Nom » en général.
 
اللهِ « Allâh »      
Il est rapporté de l’Imam as-Sâdeq(p) (le 6ème Imam), répondant à quelqu’un qui lui avait demandé ce qu’est Allâh :  « Il est le Seigneur et l’Adoré. Il est Allâh, et quand je dis Allâh, ce n’est pas pour établir les lettres « a, l, l, h », mais je réfère à un sens qui est : « une Réalité créatrice et Artisan des choses », sens auquel s’appliquent ces lettres. C’est le Sens qui est nommé « Dieu », le « Tout-Miséricordieux », le « Très-Miséricordieux », le « Tout-Puissant » et autres noms semblables : c’est l’Adoré, Tout-Puissant et Majestueux. ». ( Kitâb at-Tawhîd, - bâb ar-rad ‘alâ-th-thanawiyya wa-z-zanâdiqa n°1)
  
« Allâh » est le Nom le plus grandiose et la première Manifestation de la Vérité Très-Elevée (Dieu). « Allâh » serait un nom « regroupant » (jâmi‘) pour la Station de l’Essence, pas la Station de l’apparition (azh-zhuhûr). Le Nom est la manifestation de celle-ci-même.
 
« Allâh » est le « regroupant » ou « synthétique » (jâmi‘) pour l’ensemble des Perfections au niveau de l’apparition (azh-zhuhûr). Les autres Noms sont tous des manifestations du Nom le plus Grandiose (al-ism al-a‘zham).
 
Ainsi, se lier au Nom de « Allah » ce serait d’abord reconnaître le besoin de ce Nom du point de vue de l’ensemble (et non d’un aspect particulier).
 
 
En conclusion..
 
Tous nos mouvements se font par la « grâce » du Nom de Dieu. Nous ne pouvons pas nous isoler du Nom de Dieu. Nous sommes des Noms de Dieu comme le monde dans son ensemble est un Nom de Dieu, est une Manifestation de Dieu. Quand nous recherchons l’Aide de Dieu, nous ne le faisons que par l’intermédiaire du Nom de Dieu, par cette apparition (zhuhûr). Tout est par la Grâce de cette Apparition du Nom de Dieu, sous sa manifestation de la Miséricorde.

بِسْمِ اللهِ الرَّحمَنِ الرَّحِيم (1)
 
Bi-smi-llâhi ar-Rahmâni ar-Rahîmi,
 
Par [la grâce du] Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux,
 
الْحَمْدُ  لِلّهِ رَبِّ العَالَمِينَ (2)
 
al-hamdu li-llâhi rabbi-l-‘âlamîna,
 
la Louange est à Dieu, le Seigneur des mondes,
 
بسم الله     » Bi-smi-Allâhi  «
 
C’est la seule sourate où le basmalah est considéré comme le premier verset de la sourate. Pour le début de l’étude du Basmalah, voir le numéro précédent N°0.  Il reste à savoir, cependant, à quoi le Basmalah est rattaché et s’il change de sens selon ce à quoi il est rattaché.
 
الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ« ar-Rahmân » « ar-Rahîm »     
 
Deux Attributs que Dieu S’attribue, des dérivés de ra-h-ma (la miséricorde) qui indique l’Effusion divine.
 
Y a-t-il une différence entre ces deux formes « rahmân » et  « rahîm » ? D’un point de vue linguistique, la forme   « rahmân » a valeur de « totalité englobante » alors que « rahîm » a valeur d’intensité et de maintien, de sorte que la Miséricorde dans  « ar-rahmân » serait générale, pour l’ensemble de Sa Création et dans « ar-rahîm » serait particulière, spécifique à certains.
 
Quelle serait la fonction de ces deux Attributs ? Qualifier Dieu pour mettre en évidence ou faire une distinction ? Ou sont-ils en apposition au Nom de Dieu, pour indiquer le Nom par lequel nous sollicitons l’Aide de Dieu ?
 
الْحَمْدُ  لِلهِ رَبِّ العَالَمِينَ  » al-hamdu li-llâhi rabbi-l-‘âlamîna «
-« al-Hamd » : l’éloge, la louange faite de façon volontaire (non forcée, ni intéressée)
 
-L’article « al- » indique une détermination. Donc il ne s’agit pas d’une louange, ou de n’importe quelle louange adressée à Dieu mais de la louange. Quelle valeur a cet article ? Une valeur générique, dans le sens que la louange dans sa nature revient à Dieu (mais pas obligatoirement toutes les louanges effectuées) ou une valeur exhaustive, dans le sens que toute louange est pour Dieu et uniquement pour Lui ?
 
-« le Seigneur des mondes » a-t-il valeur de qualification, ou est-il en apposition à « Dieu » précédemment cité ?
 
-« al-‘âlamîna » Pourquoi l’emploi d’un pluriel externe (ajout de « îna » à la fin du mot) alors que la forme la plus courante est un pluriel interne « ‘awâlim » (changement au sein du mot) ? Y-a-t-il là une indication particulière ?
 
-Et quels sont ces mondes ? La terre et le ciel ? les mondes matériel et immatériel ? la vie en ce monde et l’Au-delà ? les hommes et les Djinns ?
   
Reprenons.. (en nous aidant de l’interprétation d’al-Basmalah de l’Imam Khomeiny(qs), de l’interprétation du Coran de Sayyed Tabâtabâ’i, al-Mîzân et de la traduction du Coran par Yehia Alawî (Christian Bonaud) Le Coran Voilà le Livre.)
 
الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ« ar-Rahmân » « ar-Rahîm »     
 
-La fonction de ces deux Attributs cités en premier n’est certainement pas de faire une distinction car ce serait de l’associationnisme en plus que de l’incroyance ; ni ici de clarifier le Nom de « Allâh », car comment ces Noms seraient être plus explicites que le Nom « Allâh » ! Ces deux Noms seraient apposés à Dieu, explicitant « par quel » Nom de Dieu se fait l’invocation de Dieu.
  
Dans un propos rapporté, l’Imam as-Sâdeq(p) dit, à propos du Nom « ar-Rahmân », qu’il est « le « Tout-Miséricordieux » envers l’ensemble de Sa Création » et du Nom « ar-Rahîm » qu’il est  « le « Très-Miséricordieux » envers les croyants de façon particulière. » (Usûl al-Kâfî, vol.1, bâb ma‘ânî-l-asmâ’i wa ishtiqâqihâ N°1 (p114))
  Les Noms « Le Tout-Miséricordieux » et « Le Très-Miséricordieux » sont en soi des manifestations de l’Essence divine. Dieu est « La Toute-Miséricorde ». Le Nom « Le Tout-Miséricordieux » est la manifestation de « La Toute-Miséricorde » (ar-Rahmaniyyah) de la Station de l’Essence. Lier son cœur au Nom (ar-Rahmân) c’est d’abord reconnaître le besoin de ce Nom pour découvrir l’aspect divin (des choses), la Miséricorde qui embrasse toute chose.
 
Il en est de même pour le Nom « Le Très-Miséricordieux », il est la Manifestation de « La Très-Miséricorde » (ar-Rahîmiyyah) de la Station de l’Essence. Lier son cœur au Nom (ar-Rahîm) c’est d’abord reconnaître le besoin de ce Nom pour atteindre la Miséricorde particulière qui est la félicité éternelle.
 
الْحَمْدُ  لِلهِ   » al-hamdu li-llâhi  «
 -L’emploi de l’article revient à dire que la louange véritable ne revient proprement qu’à Dieu et que toute louange revient à Dieu, c’est-à-dire toute louange faite à une créature, à une chose créée revient à son Créateur, car toute chose existante est la Manifestation de Dieu, la chose créée et la louange même..  
-Le sens particulier d’al-Basmalah, dans cette sourate, rattaché à la louange serait : c’est par [la grâce] du Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux, que toute perfection existe (et elle est même Sa Manifestation, une manifestation de la Perfection absolue divine) ; c’est par [la grâce] du Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux, que toute louange adressée à cette perfection revient à Dieu (et elle est Sa Manifestation) ; c’est par [la grâce] du Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux, que celui qui fait l’éloge, possède les moyens de connaître la perfection qui suscite sa louange et peut l’exprimer, (et il est lui-même Sa Manifestation). Ainsi, par [la grâce] du Nom de Dieu, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux, la Louange est à Dieu, Celui par Qui et grâce à Qui cette louange est accomplie, et elle en est Sa Manifestation.
 
Par ce verset, Dieu dicte à Son serviteur Sa propre Louange comme pour l’éduquer, lui faire atteindre la sincérité/intégrité (ikhlâs) dans la soumission/adoration (‘ubûdiyyah) – et n’est-ce pas là l’objectif du Coran ? Si l’homme croyait sincèrement que l’ensemble des louanges sont pour Dieu et par Lui et qu’il l’appliquait réellement à toute instant de sa vie, l’associationnisme ne se réaliserait jamais dans son cœur. Et quand il louerait quelqu’un, c’est en tant qu’il est Manifestation de Dieu. Malheureusement nous sommes enveloppés de voiles et nous ne voyons pas la Réalité.
 
رَبِّ العَالَمِينَ  » rabbi-l-‘âlamîna «
-« le Seigneur des mondes » se rapporte à Dieu cité précédemment et Le qualifie.
 
-Quant à l’emploi du pluriel externe pour « ‘Âlamîne », certains y voient une marque quantitative, d’autres une restriction aux êtres doués de raison. Mais rien ne justifie de telles spécifications.
Dieu (Très-Elevé) dit dans le verset 24 de la sourate XXVI (Les Poètes) ce qu’Il entend par « les mondes ». Quand Pharaon demanda à Moussa(p), venu à lui pour lui apporter la Preuve de Dieu, ce qu’est « le Seigneur des mondes », Moussa(p) lui répondit : {Le Seigneur des cieux et de la terre, et de ce qu’il y a entre les deux.}, c’est-à-dire l’intégralité des mondes et ce qu’il y a à l’intérieur. Ce mot désigne donc l’ensemble de la création, l’ensemble des créatures, et/ou les milieux qui les contiennent.
الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ (3)
ar-Rahmâni ar-Rahîmi,
 
le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux,
 
مَالِكِ يَوْمِ الدِّينِ (4)
Mâliki yawmi-d-dîni,
 
le Souverain du Jour du Jugement.
 
إيَّاكَ نَعْبُدُ وَ إِيَّاكَ نَسْتَعِينُ (5)
Iyyâka na‘budu wa iyyâka nasta‘înu.
 
C’est Toi que nous adorons/servons et c’est de Toi que nous recherchons l’aide.
   
الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ« ar-Rahmân » « ar-Rahîm »     
 
Rappel des deux Attributs cités précédemment. (Voir le numéro précédent pour la signification de ces deux Attributs.) Pourquoi ? Répétition ?
 
مَالِكِ يَوْمِ الدِّينِ  « Mâliki yawmi-d-dîni »
 -« malaka » : indique à la fois la possession, la domination et la maîtrise (dans la création, la gestion et le maintien). Donc  « Mâlek » indique le Possesseur, le Détenteur, le Maître, le Souverain.
-« Dîn » connu par tous comme ayant le sens de « Religion », mais aussi de « Jugement ».
 
إيَّاكَ نَعْبُدُ وَ إِيَّاكَ نَسْتَعِينُ   « Iyyâka na‘budu wa iyyâka nasta‘înu »
 -«‘abada » : indique l’abaissement et l’asservissement devant un maître avec soumission et obéissance et par conséquent l’adoration.
 
-Pourquoi l’emploi du pluriel « nous » ?
 
-D’habitude dans la phrase verbale arabe, le verbe est en début de phrase. Ici « Iyyâka », qui est le complément d’objet du verbe, commence la phrase et se situe avant le verbe. Pourquoi ? Cela donne-t-il un sens supplémentaire ?
 
-«‘awn » aide, secours ; le verbe « isti’âna » en est une forme dérivée (la dixième (Xe) qui exprime l’idée de demander, de rechercher). Il a pour sens la demande ou plutôt la recherche de l’aide.
 
-Mêmes remarques par rapport au pluriel et la place de « iyyâka »
 
 
Reprenons.. (en nous aidant de l’interprétation d’al-Basmalah de l’Imam Khomeiny(qs), de l’interprétation du Coran de Sayyed Tabâtabâ’i, Tafsîr al-Mîzân et de Le Coran Voilà le Livre de Yehia Alawî (Christian Bonaud)).
 
الرَّحْمَنِ الرَّحِيمِ« ar-Rahmân » « ar-Rahîm »     
 
Bien sûr, on ne peut voir là une répétition. Les deux Attributs ici se rapportent à Dieu cité précédemment, Le qualifient, comme « Seigneur des mondes ». Ils nous rappellent deux des Noms par lesquels Dieu se manifeste à nous, par lesquels le monde se dresse.
 
Et nous rappelons ici que s’accrocher au Nom (ar-Rahmân) c’est d’abord reconnaître le besoin de ce Nom pour découvrir l’aspect divin (des choses), la Miséricorde qui embrasse toute chose ; et s’accrocher au Nom (ar-Rahîm) c’est d’abord reconnaître le besoin de ce Nom pour atteindre la Miséricorde particulière qui est la félicité éternelle.
 
مَالِكِ يَوْمِ الدِّينِ  « Mâliki yawmi-d-dîni »
-« Mâlek » est un Attribut de Dieu, indiquant la possession, la domination et la maîtrise. S’accrocher à ce Nom, c’est avant tout reconnaître le besoin de Lui pour se libérer de tout ce qui n’est pas Lui, dans l’occupation de la soumission/adoration de Dieu dans Sa Seigneurie.
 
Le fait qu’un complément lui a été attribué nous rappelle que la réalité de notre ordre apparaîtra le Jour du Jugement, moment où nous ne pourrons plus rien faire et que l’Autorité et la Volonté reviendront à Dieu Tout-Puissant.
 
-« Dîn »  a pour référence un sens unique : la soumission, le fait de se plier totalement à un programme ou une décision déterminée. Cela revient au sens général de la Religion qui est la soumission, le fait de se plier totalement à la Volonté de Dieu.
 
« Yawm ad-dîni », selon l’unanimité des commentateurs, cette expression est synonyme de « Jour des Comptes » « yawm al-hisâb », le « Jour de la Rétribution » « yawm al-jazâ’ » ou le « Jour du Jugement ». Il rejoint également le sens général en tant que ce Jour est l’apparition de la réalité de la Religion et de la réalisation de la soumission/adoration à l’Autorité de Dieu, le Jour du dévoilement de la Vérité.
 
إيَّاكَ نَعْبُدُ وَ إِيَّاكَ نَسْتَعِينُ   « Iyyâka na‘budu wa iyyâka nasta‘înu »
 
-Après avoir été convaincu de l’Unicité de Dieu, il s’agit de passer aux actes : se soumettre uniquement à Dieu, n’adorer que Lui et ne demander l’aide qu’auprès de Lui. Mettre le complément d’objet direct avant le verbe indique cette restriction, cette exclusivité. On ne demande à personne d’autre, uniquement à Dieu et le résultat de cette restriction est l’Unicité au niveau des actes.
 
-l’emploi du pluriel dans les verbes « na‘budu » et « nasta‘înu » est pour indiquer que Dieu, dans la présentation de notre demande, s’adresse à l’ensemble des gens, à la société, ou à un groupe de gens (ou autres), non à des individus isolés. Dieu(qu’Il soit Exalté) dit dans Son noble Livre : {Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils M’adorent. Je n’attends aucun don de leur part. Je ne désire pas qu’ils Me nourrissent. Dieu est le Dispensateur de tous les biens, Il est le Maître inébranlable de la force.} (56-58/LI) et {On leur avait seulement ordonné d’adorer Dieu en Lui rendant un culte pur.} (5/XCVIII)
 
-Ainsi Dieu nous rappelle de façon permanente Qui nous devons adorer, et à Qui nous devons demander l’aide, pour reconnaître notre soumission/assujettissement à Dieu et la réaliser au niveau des actes dans le cadre de la réalisation de l’Unicité divine.
اهْدِنَا الصِّرَاطَ المُسْتَقِيمَ (6)
 
Ihdinâ-s-sirâta-l-mustaqîma,
 
Guide-nous sur la Voie droite,
 
صِّرَاطَ الَّذِي أَنْعَمْتَ عَلَيْهِم غَيْرِ المَغْضُوبِ عَلَيْهِم و لا الضَالِّينَ (7)
sirâta-l-ladhîna an‘amta ‘alayhim ghayri-l-maghdûbi ‘alayhim wa lâ-d-dâllîna.
 
la Voie de ceux que Tu as comblés de Tes Bienfaits, non pas de ceux qui encourent Ta Colère, ni des égarés.
  
اهْدِنَا الصِّرَاطَ المُسْتَقِيمَ  « Ihdinâ-s-sirâta-l-mustaqîma »
 
- « hudâ » : direction, ce qui sert à guider et à montrer le bon chemin, indication (≠égarement). « Ihdinâ » en est une forme dérivée (IV) qui a très souvent un sens factitif ou causatif : c’est-à-dire « conduis-nous », « guide-nous », « offre-nous la bonne direction ». Comment ? Selon une voie large et droite
 
-« Sirât » : la voie claire, large, sans tenir compte du but, ni du terme.
 
-« mustaqîm » droit, rectiligne, de la forme dérivée (la Xe) de « qâma » qui veut dire « se tenir debout » « se dresser droit ».
 
Nous demandons à Dieu et uniquement à Lui de nous indiquer la voie droite. Mais comment se manifeste-t-elle à nous, par quel intermédiaire ? Et comment la reconnaître ?
 
صِّرَاطَ الَّذِي أَنْعَمْتَ عَلَيْهِم  « sirâta-l-ladhîna an‘amta ‘alayhim »
 
-Dieu nous donne des caractéristiques de cette voie droite : celle de ceux que Tu as comblés de Tes Bienfaits ». Qui sont ceux qui ont bénéficié des bienfaits de Dieu ? De quels bienfaits s’agit-il ? matériels ? moraux ?
 
غَيْرِ المَغْضُوبِ عَلَيْهِم و لا الضَالِّينَ  « ghayri-l-maghdûbi ‘alayhim wa lâ-d-dâllîna »
 
-Dieu nous donne deux caractéristiques de ces gens : ceux qui n’encourent pas la Colère de Dieu et qui ne sont pas égarés. Qui sont ceux qui encourent la colère de Dieu et qui sont égarés (que Dieu nous en préserve !) ?
   
Reprenons.. (en nous aidant de l’interprétation du Coran de Sayyed Tabâtabâ’i, Tafsîr al-Mîzân et de Le Coran Voilà le Livre de Yehia Alawî (Christian Bonaud))
  
اهْدِنَا الصِّرَاطَ المُسْتَقِيمَ  « Ihdinâ-s-sirâta-l-mustaqîma »
 
Après avoir reconnu la soumission/assujettissement à Dieu et la totale dépendance par rapport à Dieu, nous demandons la Guidance de Dieu sur terre : la voie droite qui va nous mener assurément à la Proximité divine, qui est unique, une seule voie déterminée par Dieu pour atteindre la Proximité de Dieu.
 
Il est rapporté que le Messager de Dieu(s) fut interrogé sur le sens de « la voie droite ». Il(s) répondit : « C’est la voie des Prophètes et ils sont ceux que Dieu a comblés de Bienfaits. » Tous ont appelé à la Religion de l’Unicité de Dieu.
 
Il en fut de même avec l’Imam as-Sâdeq(p) qui répondit : « La voie est la connaissance de l’Imam » ou, dans un autre propos rapporté : « Nous sommes la voie droite. » Ainsi, en l’absence de Prophètes(p), ce sont les Imams qui assurent ce rôle.
  
صِّرَاطَ الَّذِي أَنْعَمْتَ عَلَيْهِم  « sirâta-l-ladhîna an‘amta ‘alayhim »
 
Dieu (qu’Il soit exalté) dit dans son noble Livre :  {Ceux que Dieu a comblés de Ses Bienfaits : les Prophètes, les véridiques, les martyrs et les vertueux.}(69/Les Femmes IV) Voilà ceux qui bénéficient des Bienfaits de Dieu. Donc la voie droite est celle des Prophètes, des véridiques, des martyrs, des vertueux. En connaissant les bénéficiaires, on peut se faire une idée de quels « Bienfaits » il s’agit.
  
غَيْرِ المَغْضُوبِ عَلَيْهِم و لا الضَالِّينَ  « ghayri-l-maghdûbi ‘alayhim wa lâ-d-dâllîna »
 
-Plusieurs versets du noble Livre de Dieu(s) indiquent ceux qui encourent la colère de Dieu, notamment : les incroyants  (106/XVI), ceux qui n’ont pas cru aux signes de Dieu et ont assassiné injustement les Prophètes (112/III), les hypocrites, les associationnistes, ceux qui ont une mauvaise opinion de Dieu (6/IIL), ceux qui discutent au sujet de Dieu, après Lui avoir répondu (16/XLII)…  (Que Dieu nous préserve d’être de ceux-là).
 
-Quant aux égarés, de nombreux versets parlent d’eux comme : ceux qui ne croient plus après avoir eu la foi et qui ont augmenté leur incroyance (90/III), ceux qui ont adoré le tyran (60/V), ceux qui ne suivent pas la guidance de Dieu (177-179/VII), ceux qui désespèrent de la Miséricorde de Dieu (56/XV), ceux qui traitent les versets de Dieu de mensonge (105-106/XXIII), ceux qui adorent des divinités (42/XXV), ceux qui suivent le diable qui égare (15/XXVIII),  les menteurs, les grands jureurs méprisables (7-10/LXVIII), le père (oncle) d’Ibrahim (86/XXVI).. (Que Dieu nous préserve d’être de ceux-là).
 
Ainsi, nous demandons à Dieu de nous diriger pour ne pas faire partie de ceux-là, tant au niveau de l’orientation que des actes.
  
Dieu nous a demandé de répéter cette sourate plus de dix fois par jour dans nos prières quotidiennes, montrant par là l’importance de cette sourate. Cela révèle aussi l’épaisseur des voiles qui enveloppent nos cœurs qui nous empêchent d’accéder à la Voie droite juste qui mène directement à la Proximité de Dieu et qui impliquent la nécessité de ne jamais nous considérer  comme étant « parvenus au but ». Nous devons sans cesse être dans une attitude de recherche de cette « voie droite » (c’est-à-dire celle des Prophètes, des Imams et donc de celui qui représente le dernier(qa) d’entre eux pendant son occultation)  et de rester vigilants à nous y maintenir pour ne pas nous trouver parmi les égarés ou ceux qui encourent la colère divine et pour rejoindre les Bienheureux.
 

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